La scène présentée au monde entier, le premier jour de l'Aïd, est loin de divulguer tous les secrets entourant l'exécution de l'ancien président. La télévision nationale irakienne «Al-Iraquia» a diffusé, samedi, les premières images de l'exécution du président déchu Saddam Hussein. La scène, qui a duré près de 40 secondes, a fait le tour du monde. Les images ont montré un Saddam Hussein, calme, très attentif, contrairement à ce que voulait faire croire ses exécuteurs, discutant avec son bourreau cagoulé, alors qu'il plaçait le noeud d'une corde autour de son cou. Vêtu d'une tenue de deuil, (pantalon, manteau noirs et une chemise blanche), les cheveux bien coiffés, la barbe soignée, il n'a montré aucune résistance, aucun signe de peur ou de remords, comme s'il s'agissait d'une mise en scène à laquelle il a bien voulu prendre part. El Iraquia n'a en revanche pas montré la pendaison, pour des raisons non dévoilées, mais afin de lever les équivoques et convaincre les plus sceptiques de la mort de Saddam, la chaîne irakienne chiite Biladi a pris la relève en diffusant 24 heures, en exclusivité aussi, (dans une démarche qui s'apparente à un jeu d'équilibre politique dans le pays entre chiites et sunnites) les images de la dépouille de l'ancien raïs placée dans un linceul blanc, et dont la tête restait visible. Le corps sans âme a été posé par- terre comme celui d'une bête abattue. Au-delà des aspects judiciaires liés au procès qui a duré une année, au-delà aussi de ce qu'il a pu commettre ou de ce qu'il n'a pas fait durant son règne de 35 ans sur l'Irak, les images, présentées au monde entier le premier jour de l'Aïd sont loin de divulguer tous les secrets entourant son exécution. La première problématique qui s'impose tourne autour d'une question majeure. Fallait-il diffuser ces images? Si la majorité des chaînes internationales ont vite fait d'acheter les droits de rediffusion, comme les chaînes américaines, qui ont censuré les images des victimes du 11 septembre, par respect aux victimes, d'autres à l'image de TF1 se sont abstenues de transmettre la scène. «Les images sont violentes, pour cette raison, la chaîne a décidé de ne pas les diffuser», avait précisé la présentatrice du JT. Un avis partagé par nombre de professionnels de l'image. Les sémiologues estiment que la violence des images ne se réduit pas aux images de la violence. Mais il est d'autres images qui exercent un effet comparable à la violence, des images traumatisantes. Elles infligent comme des coups, des injures, des blessures psychiques à des populations entières. «Ces représentations-là peuvent susciter une violence physique en réaction, mais elle est toujours vécue par ses auteurs comme une réponse à une violence première et insupportable». La théorie a été vérifiée sur le terrain, les images ont provoqué l'effet «inverse» (sauf si le gouvernement Irakien visait cela). Saddam a suscité la compassion de la nation arabe qui s'est sentie humiliée, agressée, provoquée, en ce premier jour de l'Aïd. Sur le plan interne, la paix promise par Bush après ladite exécution semble avoir un long chemin, des civils continuent de périr victimes de la violence armée. L'on a toujours utilisé des images en propagande, loin de toute déontologie. Et celles de samedi voulaient traduire une «exécution parfaite», en respectant les droits de l'homme. Saddam a eu même droit à des explications sur la manière dont il sera exécuté, des détails auxquels il semblait prêter incroyablement attention. Mais les téléspectateurs n'ont rien entendu, le son a été coupé, pour des motivations qu'on ignore aussi. et les images diffusées par le site Internet démontrent toute la haine ressentie par ses bourreaux.