En recourant à la poésie libre, les poétesses veulent sortir des chemins escarpés d'une poésie classique au verbe pensé et à la rime soutenue. Le verbe italien, dans toutes ses dimensions esthétiques, a été présent dimanche dernier à la Bibliothèque nationale d'Algérie, à l'occasion d'un récital poétique organisé par ladite institution culturelle, en collaboration avec l'Institut culturel italien d'Alger. Il a été représenté par trois poétesses, trois femmes portant en elles le mot libre. Il s'agit de Elisa Davoglio, 31 ans, venue de Rome; Laura Pugno, 32 ans, venue de la région de Piemont, dans l'ouest de l'Italie; et enfin Lidia Riviello venue de Rome. Les trois femmes, détenant la maîtrise de la vie (poésie en grec signifie la vie), sont venues pour donner un aperçu de la poésie italienne contemporaine. Leurs vers, traduits en français, ont été déclamés par la poétesse et artiste-peintre Halima Lamine. Dans un style de vers libres, Elisa Davoglio, diplômée en gestion du paysage et dont la thématique est surtout axée sur «la fuite inexorable du temps», a récité quelques passages de ses poèmes, notamment ceux intitulés Le Cose che (les choses), qui et Il mio amico (mon ami) dans lesquels, elle met en exergue respectivement la simplicité des choses et l'importance de l'amitié. De son côté, Laura Pugno pour qui «le vers libre permet à la poésie de trouver sa propre forme, son propre rythme», a déclamé des textes mettant en valeur la combinaison harmonieuse entre les langages littéraires, courants et médiatiques. «Cette absence de belles images, de jeux de mots, de phrases toutes faites, de séries de mots et d'autres automatismes nous font penser à une lutte contre l'inertie du langage», écrit le critique Stefano Dal Bianco à propos des textes de cette poétesse dont le «discours semble être régi par une logique aussi bien solide que mystérieuse, mais formelle et mathématique». Utilisant, elle aussi, des vers libres, Lidia Riviello a jeté, à travers ses oeuvres, notamment celle portant le titre Da Rum e acqua frizzante (d'après rhum et eau pétillante), un regard sur la société de consommation. Voici un extrait: «Mais, comment faire pour concevoir le nouveau-né?/ Le mécanisme de la consommation se déclinait au féminin/ une pleine lune parcourt à pied/ c'était le moment de la production/ qui comptait celui des pommes de terre blafarde du néon affiné par le modèle unique/ C'était un moment visible et maternel/ jusqu'au jeûne complet». «C'est un peu une critique sociale», a indiqué la femme de lettres qui a aussi évoqué, dans son recueil, la rencontre entre les êtres, à l'instar du poème intitulé L'amore self control. «J'ai rarement rencontré un texte littéraire aussi libéré de la préoccupation de surcharger l'image d'interprétations symboliques et idéologiques ou autres, et si concentré sur le fragment de la réalité qui se manifeste et sur l'instant où il se manifeste», dira de son travail, la critique Carla Vasio, ajoutant que la «force (de Lidia Riviello) réside dans le fait de savoir penser littérairement, sans artifices». En somme, le point commun des trois poétesses est qu'elles sortent des chemins escarpés, et trop académiques, d'une poésie classique au verbe pensé et à la rime soutenue. Le verbe est libre, tout comme leur pensée. Leurs rimes est bohémiennes et solitaires qui ne cherchent pas l'accouplement, ou peut-être la conjugaison, avec une autre lettre. Chez elles, le mot maîtrise la danse des temps et des modes. C'est en fait, l'effluve émanant des gestes en provenance du trèfonds de l'âme humaine.