Du bleu à l'âme, rouge du ciel et de la terre, au gré du pinceau, coulent les émotions de la plume... «Par le boulevard front-de-l'âme» voilà comment décrit Wahiba Aboun Adjali son chemin qui l'a conduit vers son Algérie entre hier, aujourd'hui et en devenir. Une Algérie rêvée, possédée, fécondée, vivante mais trimballée, souvent saccagée, marquée de douleur, torturée, malmenée mais qui reste fière et altière, magique, avec ses «filles d'orgueil et ses femmes indomptées». Ainsi, nous raconte cette galeriste: son amour pour celle que l'on surnommait jadis la ville blanche. Et le test se fait voix et couleurs, car rien n'est trop beau pour cette mathématicienne, que les combinaisons... A cette disposition harmonieuse de mots et de sensations, sont venues se perdre et se fondre les vagues à l'âme d'un autre artiste, Philippe Amrouche qui mettra en correspondance les deux ouvrages, texte et peinture abstraite, pour en faire une fusion d'une seule oeuvre d'art, indissociable. Le résultat donnera naissance à trois éditions. La première, une édition de tête, dite de bibliophilie contemporaine, ne comprenant que 15 exemplaires originaux entièrement réalisés à la main sur un papier rare (Chine, Japon...). Une oeuvre d'art calligraphiée et illustrée de dessins et de peintures de Philippe Amrouche. Cette série a été réalisée par une maison d'édition associative, Emérance, basée à Angoulême. Mais ce bijou éditorial a vu le jour à Alger, son prototype ayant été conçu dans l'atelier du grand peintre Khadda, ouvert, pour la première fois, depuis sa mort, en mai 1991. C'est cette première version, dont les droits ont été acquis par les éditions Apic d'Alger, qui a servi de base aux deux autres: une édition d'art en 1000 exemplaires tirée sur offset et un recueil de plus large tirage regroupant les textes poétiques de Wahiba Adjali, au prix modeste de 300DA. Né en 1966 à Angoulême, Philippe Amrouche est peintre graveur et calligraphe. Sa rencontre avec des poètes entres autres, Wahiba Aboun Adjali, Bernard Noël, Abdelatif Laâbi, Claude Margat...a donné lieu à l'édition de plusieurs livres de bibliophilie contemporaine. Il dirige également les éditions Emérance qui associent oeuvres originales et poésie. A propos de Wahiba Adjali, son «antidépresseur», dont il ne tarira pas d'éloges, nous confie: «On soutient une cause commune, comme une volonté de dire chacun ce qui l'anime. On n'est surtout pas dans l'illustration. On est dans l'accompagnement. C'est un travail de concert. De résonance vers une quête de liberté...Wahiba exprime cette force et ce courage, la beauté étant ce qu'elle est, j'avais envie d'accompagner ce courage...», nous dira Philippe Amrouche, en aparté, mercredi dernier, à la suite du récital poétique de Wahiba, et le chant de Taos Amrouche, animé par Flora qui égayera le palais de la culture Moufdi-Zakaria, qui signera avec les éditions Apic cet événement culturel. Enfin, les oeuvres plastiques de Philippe Amrouche sont, aussi, à découvrir car accrochées aux cimaises de ce beau palais où a eu lieu le vernissage de cetteprécieuse exposition, sous le nom Quand le pinceau peint la plume...