La campagne électorale pour la présidentielle a démontré, encore une fois, l'écart existant entre «les deux France». Celle incarnée par Ségolène Royal, et l'autre farouchement défendue par Nicolas Sarkozy. Les élections françaises suscitent l'intérêt du Maghreb au vu des liens historiques qui lient les deux rives. La communauté maghrébine, qui représente pas moins de 3 millions de membres, aura son mot à dire aujourd'hui. L'enjeu des banlieues et du passé tumultueux entre les pays maghrébins et la France ne seront pas sans impact sur les résultats de ce second tour. Il faut dire que les discours électoraux des deux principaux candidats ont réservé un large espace à ce partenariat, reste que la question la plus marquante qui était au centre de tous les débats a trait au passé colonial français en Algérie et à la repentance. Celle-ci divise la classe politique et, à travers elle, la société française. La campagne électorale pour la présidentielle a démontré, encore une fois, l'écart existant entre «les deux France». Celle incarnée par Ségolène Royal, et l'autre farouchement défendue par Nicolas Sarkozy. Royal qui a tenu un discours jugé pas tranchant, flou, et indécis sur beaucoup d'aspects liés, notamment aux choix économiques, aux relations extérieures, n'a pas tergiversé, par contre, sur ce dossier, celui de l'histoire, en prenant même, selon les observateurs, des risques. Elle a proposé à la France, à ce propos, une politique globale de réconciliation avec son histoire. «Le prochain président de la République achèvera son mandat en 2012, année du 50e anniversaire de la fin de la Guerre d'Algérie. Cette année-là doit être celle de la mémoire apaisée» a-t-elle déclaré dans l'une de ces récentes sorties. Royal évoque le «devoir de la Connaissance», et s'aligne paradoxalement sur la vision de L'UMP, en soutenant que celle-ci doit pouvoir se développer «sans repentance, ni amnésie». L'histoire en France, du moins celle liée à la guerre d'Algérie, est en train d'échapper aux historiens. Les politiques français promettent de rendre à César ce qui lui appartient, mais ce sera après l'élection. La candidate du PS projette, si toutefois elle est élue, la création d'une commission indépendante pour traiter les grandes questions qui divisent, aujourd'hui, les Français, à savoir le rôle de la colonisation française, les drames liés à la fin de la Guerre d'Algérie, un clin d'oeil en direction des harkis, très courtisés (sachant qu'ils représentent plus de 500.000 voix). «Le gouvernement, sous mon impulsion, mettra en place des mesures d'aide systématique aux descendants de harkis qui s'investissent dans la vie économique, la vie sociale et culturelle de la France». a-t-elle promis. Tout compte fait, Ségolène Royal eut le mérite de qualifier la colonisation de «système de domination, de spoliation et d'humiliation», ce qui n'est pas le cas pour le candidat de l'UMP. Pis, Sarkozy qui défend que «si la France a une dette morale, c'est d'abord envers les Français d'Algérie rapatriés», a pris de court tout son monde en adressant une lettre (révélée par Le Monde), le 16 avril au président du Comité de liaison des associations de rapatriés (CLAN-R), dans laquelle il s'engage «de ne jamais sombrer dans la démagogie de la repentance.». Et était favorable à ce que les «victimes françaises innocentes» de la guerre d'indépendance et «tout particulièrement les victimes du 26 mars 1962» se voient reconnaître la qualité de «morts pour la France». Des déclarations sévèrement stigmatisées par le chef du gouvernement qui voyait, en cet engagement, une volonté de réhabilitation de l'OAS. En France, Sarkozy a l'appui des harkis. Le 18 avril, le président du Comité national de liaison des harkis (Cnlh), a appelé la communauté harkie à «voter pour le candidat UMP», car c'est le seul qui s'est engagé «par écrit» à régler définitivement le problème de cette communauté, à commencer «par la reconnaissance de la responsabilité de l'Etat français dans l'abandon et le massacre des harkis après les accords de cessez-le-feu du 19 mars 1962». Concernant l'avenir, Il ne faut pas perdre d'esprit que M.Sarkozy refuse toute idée de traité avec l'Algérie. «L'amitié n'a pas besoin d'être gravée dans le marbre d'un traité». Mettant en cause le projet du président sortant M.Jacques Chirac. Le candidat a une autre vision pour l'impulsion des relations bilatérales franco-algériennes qui s'articule autour du développement de la coopération économique. Sur ce chapitre, justement, un très long chemin reste à faire. Certes, les échanges commerciaux entre les deux pays ont atteint 8 milliards d'euros en 2006 et la France est le premier fournisseur de l'Algérie avec une part de marché de 20%. Les investisseurs français restent réticents malgré les bons points accordés par la Coface. La France qui a cédé la place aux Américains durant la tragédie nationale tient à retrouver cette place. Elle reste, néanmoins, le premier investisseur en Algérie, hors hydrocarbures, avec 245 millions de dollars en 2006.