La démission de la communauté internationale aura laissé le champ libre à Israël où sévissent, dans les territoires occupés, l'intolérance, les horreurs et les abus. Voici quelques années, plus précisément au début de la décennie 90, après l'effondrement du bloc communiste, le mot clé était «ingérence». Entre «devoir» et «droit», l'ingérence était à toutes les sauces. Et c'était à qui s'ingérait le mieux pour sauver la veuve et l'orphelin et sauvegarder les peuples en détresse. Si les ONG s'y mettaient massivement, les Etats, qui n'étaient pas en retard, préconisaient qui le devoir qui le doit, d'ingérence, pour venir en aide aux peuples en danger. Les Etats-Unis, la France - qui, à la faveur des événements de Roumanie, en 1989 a été la première à proposer au Conseil de sécurité cette notion toute nouvelle de «devoir» d'ingérence - et dans leur sillage, les puissants de ce monde adoptèrent ce concept. Concept qui ne tarda pas à trouver son application sur le terrain, en janvier 1991 contre l'Irak qui occupait l'émirat du Koweït depuis août 1990. Les mêmes qui ont monté une expédition punitive contre l'Irak en 1991, récidivent en 1998 en s'attaquant à la Serbie, coupable d'oppression contre la minorité albanophone du Kosovo. Ainsi, la communauté internationale ne veut plus tolérer l'occupation d'un pays par un autre, ou les brimades et oppressions contre une minorité, fût-ce à l'intérieur d'un pays souverain (le cas de la RF de Yougoslavie). Or, ne voilà-t-il pas que les territoires occupés (comme leur nom l'indique, ce n'est pas la Palestine, ce sont les territoires occupés qui figurent en tant que tels dans les annales des Nations unies) où sévi une sévère répression contre une population désarmée, réunissent toutes, à tout le moins les deux conditions, ayant fait agir la communauté internationale au Koweït (occupé) au Kosovar (opprimé). Las! Ce qui était urgent et du ressort de la communauté internationale au Koweït et au Kosovo, ne semble point être le cas dans les territoires palestiniens occupés. Les Etats-Unis, qui ont monté une armada mondiale contre l'Irak, qui ont donné le feu vert à l'OTAN pour attaquer la Serbie, s'opposent non seulement à ce que Israël soit accusé comme l'ont été l'Irak et la Serbie, mais encore, ce qui est plus grave, à ce que le Conseil de sécurité envoie une force d'interposition entre les belligérants, laissent ainsi le champ libre, à l'armée israélienne de poursuivre le massacre - à huis clos - du peuple palestinien. L'intolérance, des horreurs et des abus se commettent quotidiennement dans les territoires palestiniens. où sont donc les héraults des droits de l'Homme, les Bernard Kouchner, et consorts et toute cette cohorte prompte à s'indigner, à se lever comme un seul homme lorsqu'il s'est agi de Saddam Hussein ou de Slobodan Milosevic, qui observent un silence curieux lorsqu'un criminel, qui ne le leur cède en rien, Ariel Sharon, bénéficie d'une bien étrange et suspecte mansuétude... Comment se fait-il que ce qui est intolérable partout dans ce monde, devient «compréhensible» dès lors qu'il est le fait de l'Etat juif? Partout dans le monde le colonialisme est condamné, alors que la conférence de Durban sur le racisme veut l'assimiler à un crime contre l'humanité, quand on feint de croire qu'Israël n'est pas concerné par le problème. Lui qui occupe, depuis un demi-siècle, les territoires octroyés par l'ONU à l'Etat arabe en Palestine. Aussi, comment les Etats-Unis qui se veulent à la tête d'une moralisation des rapports entre les hommes et les Etats, défendent l'indéfendable pour ce qui est des territoires occupés par Israël? Dans son intervention à la conférence mondiale sur le racisme de Durban, Kofi Annan, secrétaire général de l'ONU, parle d'or lorsqu'il déclare: «Le peuple juif a été victime de l'antisémitisme dans beaucoup de parties du monde, et en Europe, il a été la cible de l'holocauste, l'abomination ultime» (...) Et de poursuivre: «Pourtant, nous ne pouvons pas attendre que les Palestiniens acceptent cela comme une raison pour ignorer les torts qui leur sont faits - déplacements, occupations, blocus, et aujourd'hui exécutions extrajudiciaires - quel que soit le terme par lequel on les décrit» mais, il conclut en renvoyant dos à dos Israéliens et Palestiniens lorsqu'il dit: «Mais, mes chers amis, les accusations mutuelles ne sont pas l'objet de cette conférence. Notre objectif principal doit être d'améliorer le sort des victimes.» Que demandent les victimes palestiniennes de la répression israélienne, sinon d'être protégées. M.Kofi Annan s'en lave-t-il les mains? Il faut le croire, d'autant que, arrogants, les Israéliens ne se considèrent rien moins que comme un peuple et un Etat hors normes auxquels tous les dépassement, toutes les horreurs qu'ils commettent contre les Palestiniens doivent être «compris» et «permis», sinon «pardonnés». Shimon Peres, le ministre israélien des Affaires étrangères, ne voit pas les choses autrement en réagissant aux propos du chef de la diplomatie finlandaise Erkkii Tuomioja. Ce dernier a eu l'outrecuidance de comparer la politique d'Israël à celle dont les juifs ont été victimes dans les années 30. Ce qui fait dire à Shimon Peres: «Je suis profondément choqué par ces déclarations qui heurtent non seulement chaque Israélien et chaque juif, mais aussi toute personne de bon sens dans le monde.» Ce sont les termes de M.Peres, ce qui fait que, selon lui, l'assassinat du chef du FPLP, Abou Ali Moustapha tout comme la tentative d'assassinat, vendredi, de son adjoint Qaïs Abdel Karim (Abou Leïla) - il était absent de chez lui lorsque des missiles israéliens ont détruit son domicile à Ramallah - de même que des centaines de victimes palestiniennes sont approuvés par «toute personne de bon sens dans le monde». Est-ce de cette manière que les Israéliens montrent leur disponibilité à construire la paix, mais sans les Palestiniens, dont le sort serait alors une affaire intérieure israélienne. Le dossier proche-oriental une affaire interne à l'Etat juif? Allons donc! Et c'est le ministre finlandais des Affaires étrangères, M.Tuomioja qui a eu le courage de dire publiquement, ce que beaucoup de dirigeants dans le monde pensent, sans doute, sans oser le déclarer. C'est ainsi que le chef de la diplomatie finlandaise s'est dit «effaré (de voir) que la ligne suivie par Israël était d'écraser, d'humilier, de supprimer et d'appauvrir les Palestiniens», ajoutant: «Il est d'autant plus difficile de comprendre l'action d'Israël, que les juifs, mieux que quiconque, devraient savoir à quel point la persécution d'un peuple est quelque chose d'horrible», avant de poursuivre: «Il est choquant que certains appliquent le même genre de politique à l'égard des Palestiniens que celle dont ils ont eux-mêmes été victimes dans les années 30.» Voilà une chose qu'il fallait dire et c'est la petite Finlande, par son chef de la diplomatie, qui sauve l'honneur d'une communauté internationale tétanisée par Israël et les Etats-Unis. Pourtant, combien il serait alors facile de régler le problème en le replaçant dans son contexte original et en imposant à l'Etat hébreu d'appliquer les résolutions de l'ONU sur le dossier proche-oriental.