Enfin, on daigne s'intéresser aux artistes algériens, livrés à leur triste sort après en avoir extirpé le maximum. A l'initiative du ministère de la Communication et sous le patronage de M.Mohamed Abbou, un vibrant hommage a été rendu à l'un des plus grands noms de la chanson algérienne et kabyle, qui est resté très longtemps inconnu: l'illustre cheikh El-Hasnaoui, doyen de la chanson kabyle, exilé depuis de très longues années, parti très loin de son pays, sans jamais donner de ses nouvelles, parti peut-être par dépit, par lassitude ou encore, par nécessité. En fait, cet hommage a été à juste titre, un prétexte et une occasion pour le ministère de la Culture, sous la tutelle de la direction des Arts et des Lettres et à sa tête, Monsieur Benalia, de réunir une panoplie d'artistes qui, inquiets pour leur avenir et surtout pour leur devenir en fin de carrière - et à juste raison d'ailleurs - ne cessent, depuis des années, de frapper à toutes les portes et de lancer des appels au secours, qui, longtemps, sont restés sans écho. Aujourd'hui enfin, le ministère de la Culture, en étroite collaboration avec les différentes Caisses nationales d'assurance sociale et de retraite et grâce à la contribution de l'ONDA (Office national des droits d'auteur), présidé par M.Taoussar, se sont fixés pour mission, de venir en aide à cette frange de la société algérienne qui a tant donné à la culture et à l'art, mais qui n'a jamais rien reçu en retour, si ce ne sont abandon et indifférence. L'ONDA se charge donc de recevoir les artistes, de les recenser - et Dieu sait s'il y en a beaucoup -, d'en dresser des listes et de leur constituer des dossiers afin d'assurer à chacun, en toute justice et équité, ses droits d'auteur, tellement mérités, mais difficilement accessibles. L'initiateur de cette louable entreprise revient de droit à l'artiste Saïd Hilmi, qui se bat depuis de nombreuses années pour que l'artiste algérien retrouve sa dignité, ses droits et le respect qu'on lui doit. Selon toute l'assistance, et le ministre, M.Abbou en premier lieu, Saïd Hilmi est la première personne qui a frappé aux portes des responsables pour qu'on daigne s'intéresser aux artistes, jetés jusque-là aux oubliettes. En la présence de Biyouna, Farida Saboundji, Mohamed Hilmi, Mohamed Adjaïmi, Larbi Zekkal, Nawal Zaâtar, Zakia Mohamed, Djahida et d'autres noms connus de la scène artistique et cinématographique, des promesses ont été faites pour que la situation dramatique que connaît l'artiste algérien aujourd'hui, change et qu'une réelle prise en charge sociale et matérielle soit élaborée, développée et maintenue. «Le Chef du gouvernement est lui-même conscient de cette situation dramatique des artistes, il est convaincu de l'absolue nécessité de mettre en place un système pour défendre leurs intérêts et de, ce fait, avec l'élaboration de nouvelles lois sur la protection sociale des citoyens, le cas des artistes y sera sûrement intégré.» Ce rendez-vous donné à nos artistes et cet élan d'intérêt pour leur bien-être matériel et social, nous encouragent à penser, qu'à l'avenir, peut-être, aucun artiste ne mourra dans l'anonymat comme ce fut le cas pour la défunte Zoulikha, aucun artiste ne fera appel aux âmes charitables pour pouvoir se faire soigner par le biais d'une émission radiophonique comme le fit le talentueux Yahia Ben Mabrouk, et tant d'autres exemples d'abandon et d'indifférence à l'égard des personnes talentueuses qui ont tant donné à leur Algérie pendant leur jeunesse, qui ont contribué à l'émergence de sa culture, à l'épanouissement de ses arts, mais qui se retrouvent marginalisés et rejetés en fin de parcours parce qu'ils n'ont plus la force de donner... Pour en revenir à cet hommage à cheikh El-Hasnaoui dont on est sans nouvelles depuis longtemps, ne sont quelques fausses rumeurs concernant son décès, lancées çà et là sans fondement, l'occasion a été ici, aussi, d'apprendre de la bouche de M.Mehenna Mahfoufi, chercheur ethnomusicien, venu tout droit de Paris où il donne des cours de musique arabe, berbère et africaine, que le grand Hasnaoui est bien vivant - bien que très malade - âgé de 92 ans, il vit avec sa femme à l'île de la Réunion et est entouré de quelques médecins algériens qui tentent de «le faire vivre dignement et de l'entourer de l'affection et de l'attention qu'il mérite». «Même s'il n'a pas réclamé ses droits d'auteur, nous avons le devoir de les lui remettre», dira M.Abbou. M.Hassas, directeur de la communication à Khalifa Airways, se propose, au nom de la compagnie, de transporter Cheikh El-Hasnaoui jusqu'en Algérie. Initiative fort louable mais impossible, en raison de son état de santé, selon M.Mahfoufi. A l'occasion, les artistes ont été invités à parcourir le Sud algérien grâce à Khalifa en septembre ou octobre prochain. Un cour métrage intitulé: «L'ami Cheikh El-Hasnaoui retrouvé», réalisé en amateur par M.Mahfoufi, mais qui a quand même le mérite de nous faire voir et entendre un Hasanoui jamais vu pour certains, oublié pour d'autres, vieilli, affaibli par la maladie, mais au regard vif et à la voix chantonnante qui, dans un petit discours où il fait référence à l'amour, la beauté kabyle, la dignité et la justice, remercie tous ceux qui l'aiment, le respectent et le considèrent comme un être humain. «J'aime ceux qui s'aiment», c'est sur ces mots d'une grande sagesse que l'assistance se disperse en espérant voir noir sur blanc la concrétisation de toutes ces belles promesses...