Cinquante-quatre ans après son déclenchement, la Révolution algérienne n'a pas encore livré tous ses secrets. Cinquante-quatre ans après le déclenchement de la guerre de Libération nationale, quarante six ans après l'Indépendance, l'Histoire n'a pas encore livré tous ses secrets sur la Révolution algérienne. Peu, voire très peu, sont les écrits consacrés à ce pan déterminant l'Histoire de l'Algérie. Ce constat, qui est fait par d'aucuns, est confirmé par les historiens. Dans une conférence consacrée à cet effet et organisée, avant-hier, dans le cadre du 13e Salon international du livre d'Alger (Sila), Fouad Soufi a estimé que «les historiens n´ont consacré que peu d´ouvrages à ce qui s´est réellement passé le 1er Novembre 1954». Le constat est d'autant plus amer qu'une partie de l'Histoire du pays risque de disparaître dans les rouages impitoyables de l'oubli. «Les historiens ont omis d´étudier ce qui s´est passé réellement le 1er Novembre 1954, en se contentant d´évoquer les conditions dans lesquelles cet événement majeur a été préparé», estime le conférencier. Il faut dire, en ce sens, que l'écriture de l'Histoire d'Algérie est, soit faite par des étrangers, comme Yves Courrière, Charles-André Julien, Charles-Robert Ageron, Benjamin Stora; par des historiens algériens et non moins militants de la cause nationale, tel Mohamed Harbi, ou par de simples témoins émanant de petits militants ou de quelques responsables de l'Armée de libération nationale (ALN). Mais la problématique qui se pose non sans acuité est, celle relative à la manière dont cette Histoire est écrite. Ainsi, en se penchant sur la guerre d'Algérie les historiens algériens ou étrangers, l'ont fait tout en mettant, sciemment ou inconsciemment (?), un brin de subjectivité dans leur propos. Or, il s'agit là d'une question qui renvoie à l'ordre méthodologique et à la rigueur scientifique, à ne pas sous-estimer, notamment lorsqu'on procède à l'écriture de l'Histoire d'un pays. En cela, l'auteur d'Al Mouqadima, Ibn Khaldoun, nous apprend bien des choses théoriques tout en se basant sur des cas réels. Et qu'en est-il exactement du déclenchement de la guerre de Libération nationale? Fouad Soufi regrette, dans ce sens le fait qu'«aucune liste exhaustive des personnes impliquées dans les premières actions de lutte armée menées à travers le pays, n´ait été publiée à ce jour». Là encore, n'est-il pas préférable de ne pas trop se fier à l'Histoire officielle d'un pays? D'autant que la vérité ne peut être trouvée que dans l'Histoire «officieuse». Ce qui n'est toujours pas une sinécure! Par ailleurs, un autre intervenant au cours de cette conférence est, en l'occurrence, Aïssa Kechida, militant du Parti du peuple (PPA) et membre de l´Organisation spéciale (OS). Le conférencier a, quant à lui, rappelé que le déclenchement de la Révolution, le 1er novembre 1954, s´est fait grâce à la troisième voix qui s´est cristallisée suite à la crise née du Congrès du PPA en 1953 et le clivage entre centralistes et messalistes. Ce vieux routier de la cause nationale a rappelé, dans ce sens, le rôle joué par Mohamed Boudiaf qu´il a connu en 1949, et Mostefa Benboulaïd, qu´il dit avoir côtoyé durant la période allant de la crise du PPA, en passant par la création du Comité révolutionnaire pour l´unité et l´action (Crua), jusqu´à la réunion des 22 et la création du Comité des Six. De son côté, Mme Siari Tengour, également historienne, qui s´attelle actuellement à faire une étude sur la guerre de Libération nationale dans la Wilaya I historique, a mis l´accent sur l´importance du témoignage du colonel Tahar Zbiri dont la publication des mémoires coïncide avec le 13ème Sila d´Alger. Elle a illustré son propos par la partie de ces mémoires dans laquelle Tahar Zbiri évoque sa rencontre avec Mostefa Benboulaïd à la prison d´El Koudia de Constantine.