A défaut d'engagement et de culture politiques, l'argent semble être le seul argument. L'écho de cette pratique de «tchipa» dans la course au Sénat est d'ailleurs parvenu aux oreilles des responsables du parti. Contacté, hier, le porte-parole du FLN n'a pas démenti l'information qu'il condamne pour être «une trahison pour les militants» et promet de «sanctionner les auteurs indélicats». «Le cours est à 70.000 dinars et risque de grimper!» Ce n'est nullement un quelconque marché boursier, il s'agit, en fait, d'une «offre», selon le témoignage d'un militant du FLN, à propos de la course au Sénat. Le même constat est, d'ailleurs, établi ici et là par des élus locaux et députés de la formation de Belkhadem, à travers diverses wilayas. Certains sénateurs de ce parti majoritaire reconnaissent, à leur tour, ce qui se trame mais préfèrent se murer dans leur silence. Ils n'ont, d'ailleurs, pas été avares en mots et requièrent le sceau de l'anonymat, sur ce qui se passe en coulisses. Ils ironisent sur «les prétentions de certains copartisans et sénateurs du tiers présidentiel qui ne cessent de faire du zèle et du pied en direction du grand patron», en parlant du président de la République pour être maintenus au Sénat. Une situation d'ailleurs non démentie par le parti qui reconnaît tacitement cette pratique tout en la condamnant, selon le porte-parole du FLN, Saïd Bouhadja, qui déplore la question mais affirme qu'«aucune plainte n'a été enregistrée à ce sujet». Le même porte-parole du FLN traduit cette nouvelle forme de corruption politique par «un abject achat des consciences que nous réfutons», dira-t-il. Le parti de Belkhadem, qui continue d'essuyer des frondes à travers plusieurs wilayas en prévision du prochain congrès qui se tiendra juste après les sénatoriales, «condamne cette pratique». Bouhadja déplore «ces agissements» qui selon lui, «trahissent les militants et leur cause» et reconnaît que «cela porte atteinte à la confiance placée par la base en ces cadres». Il promet pour cela «un châtiment», affirmant que le parti sévira et que «des sanctions seront prises à l'encontre de ces contrevenants si toutefois l'on a des preuves de leur culpabilité». Ce qui est loin de la coupe aux lèvres. Pendant ce temps et entre grands électeurs, le temps n'est plus aux traditionnelles tractations en prévision des prochaines élections sénatoriales partielles prévues pour le mois de décembre. Le jeu de coulisses a bien commencé, mais bien différemment du schéma classique. A défaut de tribalisme, de régionalisme et autres «conceptions» supplantant les convictions politiques et la justesse du projet, les prétendants à cette fonction élective, des «outsiders», recourent au plus vieil argument, financier, pour glaner des voix en leur faveur et pouvant leur assurer un siège au sein de la chambre haute. Un rêve qui a incité à l'instauration d'un véritable marché boursier qui serait même né à travers certaines régions du pays. En attendant l'entrée en scène des caciques et autres dinosaures du parti, l'on parle de «chkara» (sac), d'une «tchipa» qui «varie entre 70.000 et 100.000 dinars pour monnayer toute promesse de vote en faveur de tel ou tel candidat au Sénat», assure-t-on. Les jeunes loups, puisque c'est d'eux qu'il s'agirait, seraient prêts à tout pour «goûter aux plaisirs et privilèges» qu'offre la vie au sein de la première chambre. Cette pratique n'est pourtant pas récente. Déjà, en 2006, des voix avaient été achetées jusqu'à 200.000 dinars permettant ainsi à certains d'accéder au très élogieux et pompeux titre de sénateur.