Quel que soit l'argument qu'ils vont brandir, les enseignants n'ont pas le droit d'hypothéquer l'avenir des élèves. Alerte dans le secteur de l'éducation! Cette fois, la validité de l'examen du baccalauréat est sérieusement compromise. A 40 jours du jour J, les enseignants menacent de boycotter la correction des copies des compositions des deuxième et troisième trimestres du cycle secondaire. «Nos adhérents ont décidé de ne pas remplir les bulletins des compositions scolaires restantes», a affirmé Larbi Nouar, coordinateur national du Conseil national autonome des professeurs de l'enseignement secondaire et technique (Cnapest), joint hier par téléphone. Pour l'instant, cette mesure concerne seulement neuf wilayas du pays. Cela dit, cette mesure pourrait être élargie à l'ensemble des lycées du pays à la faveur du conseil national que tiendra le Cnapest dans les prochains jours. «Nous allons tenir notre conseil national, éventuellement, cette semaine. Cette session pourrait adopter la résolution de généraliser le boycott administratif des épreuves à l'échelle nationale», a laissé entendre M.Nouar. Le Cnapest pourrait-il aller jusqu'à boycotter la correction des copies du BAC? Un tel scénario n'est pas à écarter. «Ce point pourrait figurer parmi les résolutions du prochain conseil national», a renchéri le coordinateur du Cnapest. Pour ce dernier, une telle action mettrait l'administration dans l'embarras. Mais ce sont les élèves qui vont trinquer. Et dans ce cas, les enseignants ont-ils le droit de sacrifier l'avenir des centaines de milliers d'élèves? Evidemment, le département de Boubekeur Benbouzid aura à gérer des examens de fin d'année dont la crédibilité a pris un sérieux coup. Surtout que le ministre avait estimé le retard accumulé durant l'année en cours à 10 jours seulement. Pour leur part, les observateurs s'accordent à situer ce retard à hauteur de 10 semaines. Au fur et à mesure que la date de l'examen approche, l'inquiétude des parents d'élèves s'accentue. «Cette situation conflictuelle doit cesser. Les revendications des enseignants sont légitimes mais ils doivent penser à l'avenir de nos enfants», s'est inquiété M.D., une femme au foyer dont l'aîné de ses trois enfants s'apprête à passer le BAC pour la première fois. Même son de cloche chez Lounis M., un retraité de la Fonction publique. «Le choc psychologique est consommé. Le repère que représentait l'enseignant pour l'élève est détruit», déplore l'homme aux cheveux grisonnants. Ce dernier en veut pour preuve sa fille qui est en classe terminale. «Elle a le moral au plus bas. A l'instar de ses camarades, elle vit une situation préoccupante. Ma fille se sent lâchée par ses enseignants», fulmine-t-il. Le recours répétitif à la grève et le boycott administratif ne font pas l'unanimité au sein des syndicats autonomes. «Malgré les conditions dans lesquelles nous travaillons, l'option du boycott et de la grève ne sont pas à l'ordre du jour de nos actions», a assuré Sadek Dziri, président de l'Union nationale des professionnels de l'éducation et de la formation (Unpef). Toutefois, M.Dziri a mis l'accent sur l'éventualité de mener des actions de contestation dans le cadre de l'Intersyndicale de l'éducation. «Des propositions seront soumises à nos partenaires du Cnapest dans ce sens.» Pour ce faire, l'Unpef compte tenir son conseil national d'ici le 15 mai prochain. En parallèle, d'autres syndicats de l'éducation estiment que le combat syndical repose sur une feuille de route étalée à court, à moyen et à long terme. «L'échec pédagogique de cet exercice scolaire est établi. Maintenant, il est impératif de se préparer pour la réforme du Code du travail», a estimé Idir Achour, porte-parole du Conseil des lycées d'Algérie (CLA). L'échec de cette année se situe à plusieurs niveaux. En premier lieu, la gestion du département de Benbouzid de cet exercice à été approximative. L'épisode du tablier, l'adoption du nouveau week-end, la surcharge des programmes, sont autant de facteurs qui, rappelons-le, ont provoqué la colère des lycéens. Pour leur part, les enseignants ont déclenché une grève le 8 novembre dernier. Ce débrayage a duré trois semaines. Une autre grève, de deux semaines, a été lancée le 24 février écoulé. A l'approche des examens de fin d'année, le torchon brûle entre les enseignants et l'administration. Le plus inquiétant c'est que c'est l'avenir des élèves qui risque de prendre feu.