Cette année il y aura une autre atmosphère d'autant plus que la situation politique est tendue. Au premier jour du mois sacré de ramadan, les commerçants n'ont rien trouvé que de faire passer les prix de leurs produits à une vitesse supérieure surtout ceux de première nécessité. Il est vrai que la pénurie habituelle en pareille circonstance n'est plus qu'un mauvais souvenir, mais le fléau des prix extravagants, lui, est toujours là prêt à grignoter les petites bourses jusqu'à leur dernier sou. Au marché comme en ville, les ménagères ne cessent de tourner en rond. Couffin au bras, elles sillonnent les grandes surfaces et les magasins à la recherche des denrées principales nécessaires à une table ramadanesque. «Au moins de quoi pouvoir préparer un f'tour digne de ce nom», nous dira une mère de famille qui apparemment ne trouve pas de quoi remplir un couffin familial exigeant. Au centre-ville, c'est à un autre combat que se livrent les salariés. Il est de coutume en ce mois de voir les tables de certains vendeurs à la sauvette garnies de différents produits recherchés : dattes, olives, diouls, etc. Si ces tables fournissent un minimum abordable en matière de prix, les bousculades ne sont pas à écarter. Un véritable marché aux puces s'érige alors jusqu'à provoquer des bouchons au niveau des artères principales. Les boulangeries, elles, se décorent de pains de différentes formes. Une bonne odeur de levain est perceptible à l'entrée de ces lieux où une ambiance bon enfant règne, seule consolation pour les consommateurs, qui, à ce rythme, n'auront plus à prendre d'assaut les boulangeries dès les premières heures de la matinée, ni à se bousculer en fin d'après-midi pour avoir une baguette de pain. Même constat du côté des produits laitiers d'autant plus que le lait de vache et le lait caillé sont disponibles en quantité suffisante et à un prix abordable. Du côté des fruits et légumes, le clignotant est au rouge. La disponibilité n'a pas empêché les prix de flamber jusqu'à atteindre un seuil intolérable, au grand dam des pères de famille qui d'ores et déjà, ont commencé une gymnastique mentale des plus compliquées à la recherche d'une solution leur permettant de faire face aux dépenses incompressibles qui les attendent. «Mais où sont donc les services de contrôle? s'interroge un citoyen, on ne peut plus manger de nos jours...les prix nous ont déjà précédés, jetez un coup d'oeil aux affichages et vous aurez une idée sur le coût d'un kilogramme d'haricots ou d'une livre de poivrons...». Plus loin, vers la plaine, les quelques rares personnes qui ont pu faire le plein, traînent les pieds devant les étals de volailles, poissons et viandes... «Vous savez, vous pouvez avoir de la viande à 250 DA le kilo...», lance une vieille femme. Comment et où? Les têtes se tournent vers elle. «Eh bien, de la viande congelée pardi! Il y a quelqu'un qui vient de se lancer dans ce créneau...vous aurez la viande moins sa fraîcheur...c'est toujours de la viande, quand même ne serait-ce que pour relever le goût de la chorba...et puis il y a aussi du poisson de toute espèce...depuis le temps qu'on n'en mange pas je ne me rappelle plus de son odeur...» «Du congelé! Voilà à quoi nous sommes réduits...rétorque une citoyenne outrée...Nos bourses le sont déjà, alors...». Le Ramadan à Béjaïa cette année aura sûrement une autre atmosphère, d'autant plus que sur le plan politique, les nouvelles ne sont pas du tout encourageantes. Un gala est quand même organisé au profit des familles des derniers détenus. Un geste... pour la rahma...