Dans le feu des événements, les citoyens de Kabylie s'en remettent à une organisation séculaire. Le 18 avril 2001, un jeune lycéen, Guermah Massinissa, tombe sous une rafale de kalachnikov tirée par un gendarme au sein de la brigade de gendarmerie de Beni-Douala. Cet incident, diversement interprété, met le feu en Kabylie. Deux jours plus tard, deux lycéens sont violemment appréhendés par des éléments de la gendarmerie à Amizour. Le jour même, les deux localités de la commune de Beni-Douala se transforment en champ de bataille entre les jeunes qui crient leur ras-le-bol de la hogra et des gendarmes qui, surpris par l'importance des émeutes, font usage de leurs armes. La nouvelle de la mort de plusieurs manifestants se propage comme une traînée de poudre et, en quelques jours, toute la Kabylie est plongée dans une spirale de violence qui provoque des dizaines de morts parmi les manifestants. Dans le feu des événements et une démission des partis politiques, dépassés par l'ampleur des manifestations, les citoyens de Kabylie s'en remettent à une organisation séculaire et le terme ârch occupe les devants de la scène politico-médiatique. Le mouvement est pris en charge par une structure calquée sur un modèle séculaire d'organisation de la société kabyle. C'est ainsi qu'est née la Coordination interwilayas, communément appelé ârch par les médias. Une rencontre à El-Kseur débouche sur la rédaction d'une plate-forme du même nom. Après une série de marches populaires organisées en Kabylie, les ârchs décident de marcher sur la présidence de la République à Alger. Le 14 juin 2001, une foule estimée à plus d'un million de marcheurs investit Alger et tente de forcer les barrages installés à la place du 1er-Mai. La manifestation dégénère en émeute. Quelques semaines plus tard, le 5 juillet, les ârchs tentent une autre marche sur la présidence, bloquée par les forces de sécurité aux portes de la capitale. A l'occasion de la tenue du Festival mondial de la jeunesse, la Coordination décide d'une autre manifestation qui avorte dans les mêmes conditions que celle du 5 juillet. La grande démonstration des ârchs sera la gigantesque marche organisée à Ifri le 20 août où les observateurs ont compté près de deux millions de participants. Tout au long des événements, les pouvoirs publics n'ont pas cessé d'appeler au dialogue face à l'intransigeance des animateurs des ârchs pour qui, la seule solution serait que la plate-forme d'El-Kseur soit remise au chef de l'Etat après une manifestation populaire.