Les prévisions américaines en matière de sécurité s'articulent autour de la violence non-stop dans notre pays. Hormis le Gspc, le groupe armé transnational le plus structuré et le mieux organisé en Algérie, les autres GIA n'intéressent pas les Américains outre-mesure. Mieux, depuis quelques mois, ce sont les différentes formes de criminalité qui captent l'intérêt des Américains. Pour eux, il s'agit de nouvelles formes de terrorisme et qui sont autrement plus inquiétantes. Ce constat auquel sont arrivés les responsables américains procède d'une étude de la carte sécuritaire du pays. Pour eux, seul le Gspc présente une nature digne d'intéresser au plus haut point la sécurité américaine. Cette constatation a été déjà établie et ses effets se sont transposés lors de l'élaboration de la fameuse «liste noire», dressée au lendemain des attaques du 11 septembre 2001, et qui a indexé, dans une liste non finale, 26 organisations terroristes présentant un danger pour les intérêts US. Dans une liste suivante, plus exhaustive, le Gspc a été maintenu, mais le GIA en a été évacué. Les motifs semblent tenir de la faible importance de ce groupe crépusculaire et qui présente un très faible effectif, peu de moyens, et donc un faible risque, même sur le plan local. Si le Gspc a été maintenu sous la loupe, c'est pour la seule et unique raison qu'il présente des liens (avérés? présumés?) avec Al-Qaîda, en même temps qu'il présente le profil du groupe organisé, structuré, «politisé» et bénéficiant d'un effectif actif et de soutien, assez important. Aujourd'hui, les responsables de la sécurité américaine sont les «éclaireurs» de l'investissement US en Algérie, et ces éclaireurs s'intéressent au plus haut point aux connexions des GIA, à leurs ramifications, aux moyens de financement, mais surtout à l'avenir de leurs groupes désarticulés, composites, et certainement sans grande stratégie d'avenir. Mais leur intérêt est d'autant plus accentué lorsqu'il s'agit d'apprécier le mécontentement social, la crise qui peut survenir, quand, et comment, les réseaux de trafiquants de drogue, les filières de trafic et de commerce d'armes, les contrebandiers de l'immigration clandestine, les sources d'approvisionnements et les points de chute de cette contrebande. La crise politique et sociale en kabylie et les turbulences liées au mouvement des Touareg, les nouvelles restructurations des corps de sécurité, notamment la police et la gendarmerie qui présentent le profil de «sécurité de proximité», sont d'autres points de fixation pour les Américains. Si on peut faire une analyse des priorités des intérêts sécuritaires américains en Algérie, il y a donc lieu de s'attarder sur le chapitre «crime organisé», lequel, disent-ils, est «l'avenir du terrorisme en Algérie». La persistance de la violence (pas uniquement terroriste), la crise sociale chez les jeunes, les moyens de communication, d'attaque et de camouflage en plein tissu urbain, facilement accessibles, la dévalorisation du marché du travail et l'accès aux armes rendent consistantes les prévisions américaines en matière de sécurité, ou plutôt d'insécurité. De même que le «versement» dans le grand banditisme des petits groupes armés qui s'étaient atomisés à partir du GIA et qui n'ont plus les moyens de continuer leur «guerre sainte». Alors, le motif religieux est-il définitivement écarté de la ligne de conduite directrice de ces groupes armés? Non, pas encore, car il faudrait qu'un autre habillage soit assez fort et justifié pour remplacer l'emballage religieux, qui a émaillé la violence en Algérie pendant près de quinze ans. Ce que les Américains ont, les premiers, formulé sous le qualificatif inquiétant de «gangsterrorisme» et appliqué aux groupes latino-américains, est en train de prendre forme chez nous. Sommes-nous prêts à ce nouveau défi?