Tony Blair se préparait, hier, à une difficile séance de questions-réponses à la Chambre des communes, le gouvernement étant accusé d'avoir réécrit un rapport des services secrets sur l'armement irakien pour retourner l'opinion et justifier une guerre sans mandat onusien. La révolte gronde au sein des députés travaillistes, largement majoritaires à la Chambre (412 sur 659), et l'opposition conservatrice — qui était pourtant favorable à la guerre — voit dans les difficultés actuelles du Premier Ministre une occasion de se repositionner sur le devant de la scène. Tony Blair, rentré mardi dernier d'un marathon diplomatique d'une semaine, a déjà enregistré un premier revers. L'influente commission des affaires étrangères des communes a, en effet, annoncé mardi soir qu'elle allait ouvrir une enquête sur des allégations selon lesquelles le gouvernement travailliste a manipulé un rapport des services secrets pour exagérer la menace irakienne. C'est la BBC qui a mis le feu aux poudres, citant des sources non identifiées au sein de ces mêmes services secrets. Selon celles-ci, Downing Street aurait réécrit pour le rendre plus “sexy”, et donc plus menaçant, un dossier sur l'Irak publié en février. Les premières auditions, publiques, de la commission des affaires étrangères auront lieu ce mois-ci et un rapport sera publié en juillet. Hier, Tony Blair devait, selon la presse, tenter d'allumer un contre-feu en annonçant qu'une autre commission, l'ISC (Intelligence and Security Committee), enquêtera, pour sa part, sur les conditions de l'entrée en guerre de la Grande-Bretagne. Cette annonce risque toutefois de tomber à plat car l'ISC travaille à huis clos et ne rend compte de ses travaux qu'au Premier Ministre, non au Parlement. Le ministre des Relations avec le Parlement, John Reid, a contre-attaqué hier matin, déclarant à la BBC (radio) que ces allégations provenaient d'“éléments incontrôlés” au sein des services secrets. “Qu'ils prouvent ce qu'ils avancent ou qu'ils la ferment”, a lancé M. Reid, un Ecossais proche de Tony Blair. Le dossier gouvernemental prétendait notamment que Bagdad avait la capacité de déployer des armes chimiques et biologiques en seulement 45 minutes. Pourtant, près de deux mois après la chute de Bagdad, les armes de destruction massive (ADM) irakiennes restent introuvables et chaque jour qui passe ajoute à l'embarras du gouvernement. L'impact de cette controverse commence à se faire sentir dans l'opinion.