Telghouda de Omar Mokhtar Chaâlal est un roman, mais pas parmi tant d'autres. C'est le roman d'une vie, d'une histoire, d'un passé lointain et d'une mémoire…populaire et nationale. D'ailleurs lorsqu'on entame la lecture de ce roman, le trouble nous atteint et on se dit que la vie de Abdelhamid Benzine a tardé pour être écrite. Le temps lui a manqué et la mort l'a emporté… Doyen des journalistes algériens, feu Abdelhamid Benzine a été le rédacteur en chef puis le directeur du célèbre quotidien, Alger républicain. Depuis sa naissance en 1926 et jusqu'en 2003, année de sa disparition, Abdelhamid Benzine a toujours lutté contre le mépris et l'aliénation, et a milité, tout au long de ses 77 ans, pour la liberté et la justice. Ni la liberté ni la justice, encore moins le mépris et l'aliénation n'ont disparu de ce monde… injuste, mais l'histoire a retenu et retiendra pour les années à venir le nom de Benzine, qui a fait de l'humanité sa cause première et unique. Ami de Kateb Yacine, auteur de plusieurs ouvrages, notamment La montagne et la plaine en 1980, Lambèse en 1989 ou encore La grande aventure d'Alger républicain en 1987, Abdelhamid Benzine a marqué son temps et son époque et n'a laissé personne indifférent ; d'ailleurs Henri Alleg disait à propos de lui : “L'histoire retiendra le nom d'Abdelhamid Benzine, patriote et internationaliste, militant héroïque exemplaire, fidèle jusqu'au bout.”À l'occasion du 6e anniversaire de sa disparition, les éditions Casbah rendent hommage à leur manière et de la meilleure manière à cette personnalité hautement symbolique de la presse algérienne, à travers la publication d'un ouvrage romancé de la vie et le parcours de ce journaliste et directeur d'Alger républicain, Abdelhamid Benzine, intitulé Telghouda. Ecrit par Omar Mokhtar Chaâlal, ce roman de 192 pages n'est que le premier tome d'une trilogie, qui retrace les premières années de la vie de Benzine à savoir, entre 1931 et 1945. Il est donc question de l'enfance et de l'adolescence du petit Hamid, qui découvre la vie et l'organisation de sa dechra à Beni-Ouartilane, puis à Béjaïa et enfin à Alger. Hamid est doté d'un esprit fin et d'une imagination fertile, largement développée grâce aux histoires que lui racontait sa grand-mère, Tassaâdit. Hormis l'avertissement et/ou avant-propos qui représente la seule manifestation de Mokhtar Omar Chaâlal, le roman est raconté par le petit Hamid qui se coiffe d'une double casquette, celle de narrateur et de personnage. L'auteur s'éclipse donc et cède sa place à Hamid qui se raconte ; d'ailleurs toutes les descriptions passent par ses propres perceptions et ses propres sensations. À cette fiction, se greffent des évènements historiques importants à l'exemple de la Seconde Guerre mondiale ou les mouvements nationaux pour la libération du pays. Aucune légèreté ne traverse le roman, même en parlant de l'enfance, la lucidité est bien présente, même trop présente. Mais le trouble atteint le lecteur dès la première lettre et jusqu'au point final, car on cesse de voir en le petit Hamid, l'image de Fouroulou, le personnage principal de Mouloud Feraoun dans Le fils du pauvre. Hamid et Fouroulou se ressemblent tant, dans l'ambition, la volonté, la conscience et même dans l'amour et la vision de la liberté. Acheter ce livre est un acte patriotique ; lire ce livre est un moyen de sauvegarder une mémoire populaire qui se perd et une mémoire nationale si controversée. * Talghouda : histoire romancée de la vie de Abdelhamid Benzine de Omar Mokhtar Chaâlal, tome I (de1931 à 1945), éditions Casbah, Alger, mars 2009. * Colloque international sur Alger Républicain en hommage à Abdelhamid Benzine, aujourd'hui à 9h à la filmothèque Zinet (Oref).