Deux rapports, l'un élaboré par des sénateurs, l'autre par deux instituts, ont exhorté le nouveau locataire de la Maison-Blanche à se positionner sur l'avenir de cette région. Contradictoires, le premier défend le droit à l'autodétermination des Sahraouis, tandis que le second se fait le porte-parole de la thèse marocaine. L'envoyé de l'Onu sur le Sahara occidental doit remettre son rapport au Conseil de sécurité à la fin du mois. Branle-bas de combat dans les coulisses et la nouveauté est que la question fait également débat à Washington où le dossier, assure-t-on, est sur le bureau ovale de la Maison-Blanche depuis l'automne dernier, lorsque la secrétaire d'Etat de Bush, Condoleezza Rice, faisant sa tournée d'adieu, avait souligné à Alger et à Rabat “la nécessité de régler au plus vite” ce conflit vieux de trente ans. Deux rapports, l'un élaboré par des sénateurs, l'autre par deux instituts, ont exhorté le nouveau locataire de la Maison- Blanche à se positionner sur l'avenir de cette région. Contradictoires, le premier défend le droit à l'autodétermination des Sahraouis, tandis que le second se fait le porte-parole de la thèse marocaine. Lors de son discours d'investiture, Barack Obama avait assuré qu'il voulait en finir avec la détérioration de l'image des Etats-Unis dans le monde et sa stigmatisation comme porte-drapeau de causes néo- colonialistes. Il a réaffirmé ces convictions en Turquie d'où il a même tendu la perche comme personne avant lui aux musulmans. Des sénateurs américains se sont saisis de ces belles promesses pour exiger de lui le retour des Etats-Unis au sacro-saint principe du droit à l'autodétermination du peuple sahraoui en le soutenant notamment dans l'exercice de ce droit via “un référendum libre, juste et transparent”. Pour donner plus de poids à leurs propos, les sénateurs Russel D. Feingold, James M. Inhofe, Edward M. Kennedy et Patrick J. Leahy ont, par ailleurs, rappelé que la Cour pénale internationale de justice avait déjà reconnu en 1975 ce droit au peuple sahraoui. Des informations laissent entendre également que les Américains, qui ont multiplié les contacts avec les pays du Sahel pour lutter contre les groupes armés affiliés à Al-Qaïda dans la région, souhaiteraient mettre à contribution les Sahraouis. Une mission de la CIA se serait rendue récemment dans les territoires sahraouis pour solliciter le Front Polisario à la lutte contre le terrorisme dans la région du Sahel, croit savoir La Lettre de l'Expansion dans son édition du 6 avril. Les autorités marocaines n'ont pas été mises au courant de l'initiative et le Département d'Etat à Washington en a été tenu à l'écart, afin de ne pas froisser le gouvernement marocain, affirme encore La Lettre, une publication bien informée sur les questions diplomatiques et internationales. L'initiative des services de renseignement américains constituerait alors un camouflet pour les autorités marocaines. Washington n'aurait plus une totale confiance en son allié marocain et la CIA chez les Sahraouis est un pied-de-nez à la stratégie de Rabat visant à discréditer le Front Polisario et la cause de sa lutte. Alors, pour rebondir, le Maroc a fait donner son lobby aux Etats-Unis. Un rapport préconisant l'acceptation de son fait accompli à El Ayoun et Dakhla, deux villes côtières du Sahara occidental, a paru, sous l'intitulé “Pourquoi le Maghreb compte-t-il”. Ce document élaboré par le Potomac Institute for Policy Studies (PIPS) basé à Washington et le département gestion des conflits à la School of Advanced International Studies (SAIS) exhorte Obama à accepter la solution marocaine car, selon ses experts, un Sahara indépendant serait “dangereux” pour les intérêts géostratégiques et économiques des Etats-Unis dans la région. Une littérature déjà connue. La nouveauté est dans les précisions sur les richesses du Sahara occidental (pétrole, pêche, phosphate) qui représentaient plus de 60% des exportations marocaines en 2007, dont une bonne partie vers les Etats-Unis. Ce lobby compte en son sein l'ancienne secrétaire d'Etat de l'Administration Clinton, Madeleine Albright. Info et intox ! Le dossier du Sahara occidental englué dans des négociations infructueuses est de nouveau d'actualité et Obama, avec son “yes we can”, semble représenter un espoir dans son dénouement. Le chef d'Etat sahraoui, Mohamed Abdelaziz, y croit lui. “Nous avons l'impression que, durant la présidence Obama, l'indépendance du Sahara occidental sera enfin reconnue et que notre pays fera son entrée au sein des Nations unies”, a-t-il écrit au nouveau maître de la Maison-Blanche. Il ne reste plus qu'à espérer. On verra avec le rapport de l'envoyé spécial de Ban Ki-moon et aux prochaines négociations entre Sahraouis et Marocains qui se déroulent aux Etats-Unis. D. Bouatta