L'Algérie est encore trop pétrolarisée. Ses indicateurs sociaux et économiques dépendent trop des cours du pétrole “En Algérie, le taux de chômage reste important, bien qu'il ait diminué d'une année à l'autre (à l'exception de 2007 par rapport à 2006) sur toute la période 2000-2008. Et de 25,9% en 2000, il tombe à 11,3% en 2008. Le taux de chômage prévu pour 2009 est de 13,3%. Et cette tendance à la hausse se poursuivra si le prix du pétrole continue de diminuer et si le secteur privé, voire l'investissement industriel ne viennent pas se substituer efficacement à l'Etat”. C'est du moins ce qu'a déclaré hier le Dr Rachid Boudjema, professeur en économie à l'occasion d'une journée parlementaire, organisée à l'Assemblée populaire nationale (APN) autour de la problématique de la crise financière mondiale et de ses répercussions sur l'Algérie. L'intervenant fera état d'autres statistiques disponibles pour la période 2000-2009. Celles-ci, dit-il, montrent qu'il existe une relation inverse entre le prix du pétrole et le taux de chômage. Plus le premier est important, plus le second diminue. “Cela signifie que lorsque ses recettes sont grosses, l'Etat joue activement le rôle de pourvoyeur d'emplois et ce rôle est plus social qu'économique, autrement dit, non arrimé à une stratégie de croissance économique”, expliquera-t-il, avant de noter l'impératif de distinguer “à l'avenir parmi les emplois créés en Algérie, ceux qui le sont par rapport aux objectifs de la croissance et ceux qui s'inscrivent dans le cadre des dispositifs distributifs publics”. Sur sa lancée, il notera que “les réserves de l'Algérie sont placées dans des actifs publics qui sont des valeurs d'Etat certes sécurisées, mais qui comportent un très faible rendement auquel s'ajoute la dépréciation du dollar, monnaie de placement des actifs extérieurs du pays par rapport à l'euro, monnaie de facturation de ses importations”. Pour le conférencier, “l'Algérie subit néanmoins le revers commercial de la crise à travers la chute du prix des hydrocarbures”. Sur cette question, il indiquera que “les conséquences de la crise sur l'Algérie sont donc évidemment déterminées par la nature de l'insertion de son économie dans l'économie mondiale”. Si la crise mondiale se poursuit, explique-t-il, la demande mondiale et partant les prix mondiaux des hydrocarbures vont chuter avec des effets sur les recettes d'exportation, les réserves de change, les programmes d'équipement et les rythmes de croissance des pays pétroliers. Dans le même ordre d'idées, il indiquera en faisant référence aux estimations du FMI, que “l'Algérie commencerait à sentir sérieusement les effets de la crise (déséquilibre budgétaire), si le prix du pétrole descendait à moins de 57 dollars”. Et de noter : “On estime qu'une baisse de 50% du prix des hydrocarbures réduirait de 50% les revenus d'exportation du pays, d'un tiers les recettes budgétaires de l'Etat et de 25% le PIB”. L'Algérie est alors extrêmement “pétrolarisée” au sens où ses indicateurs économiques et sociaux dépendent beaucoup du niveau du prix international des hydrocarbures, expliquera l'intervenant à cet égard. Plus précis, il dira qu'“au prix de 43 dollars en 2009, le taux de couverture des importations par les exportations est estimé à 73% (contre 251% en 2006, 218% en 2007 et 200% en 2008)” avant de considérer que “ce plongeon de la balance commerciale de l'Algérie s'explique non seulement par la baisse du prix de son article d'exportation (les hydrocarbures 43 dollars en moyenne), mais aussi par le gonflement démesuré de ses importations”. Intervenant de son côté sur la répercussion de la crise mondiale sur l'agriculture algérienne, Fouad Chahat, professeur en économie, dira d'entrée que “la crise financière et alimentaire se traduira, pour l'Algérie, par une forte hausse du coût de ses importations agroalimentaires”. À titre d'exemple, il dira que la valeur des importations, entre 2002 et 2008, passe, en millions de US$, de 1 282,6 à 4 016 pour les céréales ; 492,4 à 1 275,7 pour le lait et dérivés ; 276,3 à 764,6 pour les huiles ; 267,9 à 433,7 pour le sucre ; 111,5 à 336 pour les tourteaux ; 160,8 à 290,8 pour les plantes et tubercules. Dans le même temps, il dira que “la hausse des cours sur les marchés mondiaux va peser de plus en plus lourdement sur la balance commerciale et sur la balance des paiements du pays”, avant de préciser que “l'augmentation des dépenses à l'importation réduira d'autant les capacités d'investissement du pays, celui-ci détournant une part non négligeable de ses ressources vers le financement de la consommation”. “Elle contraindra, en effet, les pouvoirs publics à multiplier les mesures d'urgence pour garantir la poursuite de l'approvisionnement du marché intérieur et la satisfaction des besoins des consommateurs (engagements pris par des Offices publics tels l'OAIC et l'Onil), hausse des subventions permettant la stabilisation des prix du lait et du pain”, expliquera-t-il encore à ce propos.