Le marché parallèle de la devise a connu ces derniers jours d'importantes perturbations. Si certains l'imputent à des dysfonctionnements de routine, d'autres trouvent son origine dans les mesures de contrôle instituées par le gouvernement. Le marché parallèle de la devise dans la capitale est depuis quelques jours en butte à des rumeurs incessantes de manque de liquidités en euros. Certains cambistes clandestins, connus sur les hauteurs d'Alger, affirment à leurs habituels clients qu'ils n'ont plus d'euros à leur vendre “mais si tu en as toi, alors je suis preneur”, répondent-ils à chaque fois. Une virée du côté de la place “Wall Street' d'Alger, en l'occurrence la rue de la Liberté au square Port-Saïd, s'imposait. Sur place, tout paraissait anodin hier matin. Sous une pluie battante, les jeunes, avec leurs liasses de dinars à la main, étaient aussi nombreux que d'habitude. L'un d'eux, la vingtaine environ, nous a donné le “topo” du marché avec une aisance que les clients habituels connaissent bien “l'euro est à 12,60 (1 euro = 120,60 DA, ndlr) à l'achat et 120,48 à la vente”. À propos des informations selon lesquelles la monnaie européenne se ferait rare, il dira que “c'est vrai qu'en ce moment, il y a des perturbations mais on trouve des solutions”. Il expliquera ainsi qu'“évidemment, j'achète l'euro quelle que soit la quantité mais si vous voulez acheter je peux vous en procurer mais que pour les petites sommes parce que si vous voulez 2 000 ou plus il faut que vous attendiez un peu et ça peut prendre des heures ou toute la journée même”. Ces “confrères” de la place avaient le même discours. Du côté du marché ex-Clausel, point de “rupture” de monnaie, les commerçants se montrent disponibles et vous répètent “quelle que soit votre demande, on va vous la régler”. Nos “pérégrinations” à travers plusieurs quartiers de la capitale nous ont permis de poser bien des questions. Il faut dire que les rumeurs sur le manque d'euros sur le marché parallèle sont loin d'être fausses. Il y a d'abord les vacances scolaires et universitaires. Même si cela ne concerne qu'une petite minorité, il y a tout de même des “clients” réguliers des cambistes algérois qui profitent de l'occasion pour mettre le paquet. Ils achètent le maximum d'euros pour aller passer le réveillon en Europe. Mais, il ne s'agit pas uniquement de cela. Il y a surtout la peur qui a envahi plusieurs réseaux de trafic de devises depuis plusieurs semaines déjà. Une campagne de contrôle de toute transaction en devises aurait été lancée. Le “détonateur” a été l'arrestation, il y a environ deux mois, de deux commerçants à Hydra très connus sur les hauteurs d'Alger pour être des cambistes clandestins “de confiance”. Une nouvelle qui avait fait le tour de la ville. Ces arrestations auraient une relation avec ce que beaucoup appellent “l'affaire de l'autoroute Est-Ouest”. D'autres cambistes clandestins auraient aussi été interpellés. Un commerçant des hauteurs d'Alger nous a ainsi parlé d'un jeune de la commune d'El-Madania arrêté dernièrement pour ses activités dans le marché parallèle de la devise. À ce qui vient d'être énoncé, un autre paramètre est en train de prendre de plus en plus de “poids” dans le monde des affaires “en sous-main” d'Alger. Il s'agit de la campagne anticorruption lancée dernièrement par Ouyahia. La peur aurait envahi plusieurs “nababs” et les perturbations de l'euro devraient prendre des proportions plus importantes dans les semaines prochaines. Karim Djoudi, le ministre des Finances, vient d'annoncer le déclenchement d'enquêtes sur plusieurs ministères. Il a également déclaré que “les équipes d'enquête ont conduit 128 opérations de contrôle (…) 154 rapports ont également été établis sur les transgressions rapportées”. Reste à attendre les effets de ces “initiatives” sur l'économie nationale et ainsi sur le marché parallèle des devises, qui est sans aucun doute le meilleur thermomètre du marché algérien.