Les villageois de Tachtiouine, dans la commune d'Aït Yahia Moussa (25 km au sud de la ville de Tizi Ouzou), et ceux de Tlata, village voisin relevant de la commune de Tadmaït (17 km à l'ouest du chef-lieu de la wilaya), ont fait récemment appel, à travers leurs représentants dans les comités, les associations culturelles et de fils de chouhada, pour ériger, au niveau de la grotte du lieudit “Afroun”, un mémorial en hommage aux 45 ou 46 martyrs (moussebiline, disent certains) issus notamment de ces villages voisins et probablement même d'autres localités environnantes, qui y auraient péri lors de la bataille du 6 janvier 1959 à Sidi Ali Bounab et ses environs. Lors de cette opération, selon des témoignages, l'armée française avait mobilisé plus de 30 000 soldats appuyés par près d'une trentaine d'hélicoptères, lancés contre des bataillons de moudjahidine, éparpillés en sections et en groupes. Malgré l'emploi de forces, d'armes et de munitions, largement inégales en nombre et en quantité, comparativement à celles des combattants de l'ALN, ces derniers ont farouchement résisté, jusqu'aux dernières cartouches, à leur ennemi qui usa sans distinction, dans sa perte de tout sens humain, de son arme destructrice qu'est le napalm, contre la population civile et contre tout ce qu'il rencontrait encore en vie sur son chemin. Pas moins de 385 maquisards – ce sont 385 crânes déterrés, affirme Da Arezki Krim, le frère cadet de feu le négociateur d'Evian – y tombèrent alors, en plus de dizaines de blessés, mais non sans avoir fait subir de cuisantes pertes aux troupes ennemies qui enregistrèrent plus d'une vingtaine de morts et d'une trentaine de blessés, en plus de la mort de deux officiers, à savoir le lieutenant Chassin et le capitaine Jean Graziani, un centurion parachutiste ayant fait l'Indochine et que Djamila Bouhired, notre héroïne poseuse de bombes à Alger, injuria copieusement un jour d'avril 1957 lorsque celui-ci la torturait, alors qu'elle était à Maillot, blessée, sur son lit d'hôpital, comme il est rapporté sur un site Internet d'un pied-noir (www.alger-roi.net). En tout cas, les villageois de Tachtiouine et de Tlata, les fils de chouhada et les anciens moudjahid dans les communes d'Aït Yahia Moussa, de Draâ El-Mizan, de Tadmaït, de Draâ Ben Khedda, émettent le souhait, à chaque commémoration ou célébration d'évènements ayant trait à la révolution de Novembre, d'inspecter ladite grotte où 45 ou 46 martyrs seraient asphyxiés aux gaz par l'armée coloniale lors de la bataille du 6 janvier 1959, après avoir bouché sur eux l'issue du tunnel, long de plusieurs dizaines de mètres, dit-on, ouvert naturellement dans le roc. En mars dernier, commémorant le 51e anniversaire d'une autre bataille qui eut lieu le 5 mars 1959 à Tachtiouine, les mêmes moudjahidine, fils de chahids, parmi eux Arezki Bentoumi, fils d'un chef de groupe dans l'ALN, Amar Bentoumi dit “Amar Acharaïou” de Mizrana, tombé dans la bataille du 6 janvier de la même année, dénommée par les Français “Kabylie 16”, le président de l'Association nationale des grands invalides de guerre (Angig), Ramdane Sana, Amar Hamitouche dit “Amar n'Ahmed”, ancien moudjahid et membre de la kasma de Draâ El-Mizan, Amar Fedjer dit “Amar Mirabeau”, Ali Benmokdad de Tachtiouine, fils de chahid, Kamel Hassani, président du comité du village Ibouhran, et son camarade Rabah Amrioui, outre de nombreux autres jeunes et des bergers de ces villages, ont tenté d'atteindre le gouffre sis à proximité d'une rivière traversant le dense maquis forestier de Tachtiouine (Aït Yahia Moussa) et Tlata (Tadmaït) et où les 46 personnes, parmi elles, l'émissaire même des soldats français, retenu de force par les moussebiline, rapporte-t-on, furent asphyxiés aux gaz lors de la bataille du 6 janvier 1959, avant que les militaires français ne murent la grotte à l'aide de pierres. En raison de l'accès difficile et non moins dangereux, plusieurs d'entre ces personnes n'ont pas pu y aboutir. En revanche, quelques jeunes “intrépides”, accompagnés de bergers habitués des lieux, ont pu traverser ledit maquis et ont réussi à pénétrer dans la “grotte-tombe”, mais sans trouver la moindre trace d'ossements. À leur retour, les jeunots indiquent y avoir avancé sur quelque 20 mètres, mais il leur était impossible de s'y mouvoir, tant l'aventure était dangereuse, car non équipés de moyens d'éclairage. Dans les prochaines manifestations de ce genre, les mêmes organisateurs envisagent de définir d'avance des programmes précis pour la commémoration de tels évènements. Il est impératif, par exemple, de déblayer préalablement un itinéraire jusqu'à cette grotte pour l'explorer éventuellement en prenant soins de s'équiper de moyens nécessaires (projecteur électriques, cordes, chaussures adéquates, etc.). Il faut rappeler que lors de la commémoration de ces batailles en mars dernier, les organisateurs, qui n'avaient pas prévu de salle à même de contenir leurs nombreux invités, ont intervenu et écouté les narrations des faits en plein air, autour de la stèle commémorative d'Ighil Mouhou (Tachtiouine) et sans mégaphone. Cette région natale des Krim, des Mellah, Ouamrane et autres valeureux maquisards a payé un lourd tribut pour l'Algérie indépendante, en donnant pas moins de 5 colonels à l'ALN (Armée libération nationale), faut-il le redire.