Les années se suivent et, malheureusement, se ressemblent à l'entame de chaque mois de Ramadhan à Ghardaïa, où les soirées sont d'une affligeante platitude culturelle. Les rares plateaux concoctés sont ici et là d'un tel niveau d'insipidité tout en relevant déjà de la prouesse. Le nouveau directeur de la culture, installé à la hussarde, a, et c'est le moins qu'on puisse dire, du pain sur la planche. En effet, le nouveau locataire du poste, en l'occurrence M. Zoheir Ballalou, architecte de formation et ex-directeur de l'Office de promotion et de protection de la vallée du M'zab (OPVM), a tout à gagner s'il veut vraiment faire redynamiser l'activité culturelle dans sa région, à s'entourer d'abord et surtout de personnes compétentes et imbues de culture, en commençant par nettoyer “les écuries d'Augias”. Connaissant la personne, son dynamisme et sa compétence avérée là ou elle est passée, il est certain, selon beaucoup de personnes interrogées, que le choix est approprié et que l'avenir de la promotion culturelle dans toutes ses dimensions en cette région densément riche de traditions séculaires est assurément entre de bonnes mains. Entre-temps, le citoyen lambda, sevré de produits et de créations artistiques, ainsi que d'animation nocturne continue de broyer du noir et de se morfondre dans sa monotonie léthargique dans une atmosphère plus que morose, manquant cruellement de lieux appropriés aux loisirs. Comme toutes les villes du Sud, les nuits des Ghardaouis sont caractérisées par le rituel des prières des Taraouih accomplies dans les innombrables mosquées de la ville. Ce n'est qu'aux environs de 22 heures que la ville revit et sort de sa torpeur. L'animation s'amplifiant crescendo, les rues grouillant de monde s'animent pendant que des magasins de chaussures, d'habillement et d'articles scolaires lèvent les rideaux. Les cafés sont pris d'assaut par des jeunes et moins jeunes, attablés par groupe, sirotant café, thé et rafraîchissements accompagnés de succulents gâteaux orientaux, tels que qalb ellouz, qtaïef ou baqlaoua. Quelques anciens cafés centenaires assurent, bon gré, mal gré, un semblant de dynamisme et d'ambiance bon enfant, tels les célèbres cafés Madeleine, Driss ou encore Mokhtar, où les les clients, fidèles et attitrés des lieux, dans une joviale ambiance empreinte de convivialité, se shootent au café et au thé à la limite de l'insomnie. L'afflux est si important que les quelques espaces de détente de la ville sont pris d'assaut ainsi chaque soir, ce qui fait qu'il devient donc difficile d'y trouver place. Les cybercafés sont eux aussi “envahis” par des internautes accros surtout de chat, offrant ainsi à ces navigateurs virtuels, l'espace d'un moment, l'illusion d'une évasion. Le nouveau jet d'eau sur le boulevard périphérique longeant l'Oued M'zab fait, quant à lui, le bonheur des enfants du quartier, qui, chaque soir, viennent piquer une tête et barboter dans ses eaux limpides, au risque de se blesser sur les arêtes tranchantes. Pour les sorties familiales, et à mi-mois de carême, en ces journées caniculaires, où le mercure flirte le plus souvent avec les 40/42° Celsius, deux endroits restent particulièrement appréciés en soirée par les familles de Ghardaïa en quête de fraîcheur et d'espace de jeux pour leurs bambins, investissant en masse chaque soir ces lieux agréables et vivifiants. Des dizaines de familles en quête de repos choisissent le plateau de Bouhraoua qui surplombe la magnifique vallée du M'zab. Situé sur le belvédère de Sidi El-Moustadjeb, du nom d'un saint de la région, l'endroit des plus accueillants ne désemplit pas de la nuit. C'est surtout les enfants qui trouvent leur compte avec les balançoires, les chicanes et les toboggans qu'ils prennent d'assaut. Très bien éclairé et sécurisé grâce à l'implantation d'un poste de police de proximité, ce site semble très bien apprécié par les familles, avides de sorties, en quête d'un endroit tranquille pour décompresser et permettre aux enfants de gambader et de jouer en toute sécurité. La fraîcheur et la pureté de l'air de cet endroit sont aussi bien appréciées par les sportifs qui s'adonnent à de longues parties de football sur les terrains maticos adjacents, ainsi que les adeptes du jogging. Le second est installé à un endroit névralgique, à savoir le carrefour de Bounoura, à Sidi Abbaz, qui relie le nord au sud du pays, en pleine route nationale 1, s'imposant ainsi comme passage obligé et lieu incontournable pour tout visiteur de la région. Une rare beauté architecturale a été érigée sur ce qui était un vulgaire et fade rond-point, désormais baptisé place de la Concorde. Représentant un ksar en miniature, cette œuvre de deux enfants de la région impose à chaque passager de s'arrêter et de prendre des photos immortalisant son passage dans cette superbe région. Ici, au kiosque La Cabane, les fumeurs de chicha peuvent s'adonner à leur plaisir dans un agréable espace verdoyant, bien entretenu par son jeune et dynamique patron, Hamza Bitour, qui ne ménage aucun effort pour mettre ses clients dans les meilleures conditions possibles. Les famille et les enfants ne sont pas en reste de ces attentions. Un agréable espace leur est strictement réservé, avec diffusion, à bas volume, de musique agréable. Des rafraîchissements, glaces et jus, sans omettre les inévitables qalb ellouz et bourek maison, sont servis par des serveurs polis et sympathiques, avec le sourire qui nous manque tant. Dans les ksour et les cités, les habitants s'organisent entre eux pour des séances de rencontre chaque soir dans la maison d'un citoyen où on discute des affaires de la cité en s'abreuvant de thé et de friandises, tout en essayant de perpétuer cette tradition ancestrale, appelée “eddayer”. D'autres, comme ce propriétaire privé d'une résidence touristique dénommée Aghlan Paradise, formée d'un lot de superbes maisons traditionnelles située dans la magnifique palmeraie de N'tissa, à Béni Izguène, essaient de suppléer l'indigence culturelle ambiante en organisant des soirées musicales, notamment chaâbi, très appréciées par les mélomanes de la région qui en redemandent.