En raison d'une pénurie de liquidités au niveau de la poste, les citoyens ont fait leurs achats dans la précipitation et se sont livrés aux spéculations de tous bords. Dès la matinée de lundi, jour des derniers achats pour la fête de l'Aïd El-Kebir, les marchés du centre de la ville des Genêts et des chefs-lieux de commune de la wilaya étaient pris d'assaut par des milliers de personnes venus faire leurs emplettes, pour la plupart tardivement, puisque beaucoup avaient du mal à retirer leur argent au niveau des postes, comme en avait témoigné cette queue interminable, dans la soirée de lundi, à la poste de la ville de Aïn El-Hammam. Il était 15h passées et une queue démesurée s'était formée à l'extérieur de la poste, sous un froid glacial et une pluie de saison ; un élément de la BMPJ faisait l'appel sur le seuil du bureau de poste, une manière comme une autre d'apporter un peu d'ordre. Un par un, celui qui entendait son nom devait présenter sa pièce d'identité et entrer à l'intérieur pour retirer son argent. “C'est une honte”, s'indigne un père de famille : “Je dois pourvoir une famille de 9 membres durant cette fête de l'Aïd ! Cela ne vaut même pas la peine que j'attende. Je perds mon temps pour rien. Il est préférable que je sollicite quelques crédits aux commerçants qui me connaissent, c'est le seul moyen de m'en sortir. Quelle poisse !” À J-1 de cette fête de “el-baraka”, les gens aux faibles ressources se trouvent livrés à eux-mêmes. “Nos ministres ne font sûrement pas la queue à la poste et ne se bousculent pas au souknon plus ; ils ne courent pas de risques avec les pickpockets et les voleurs de tout acabit. S'ils n'ont pas de coursier attitré, payé par l'Etat, ils doivent se faire livrer les victuailles à domicile, par un accès très privé !” Commente un jeune homme à lunettes, probablement étudiant. “Ah ! s'ils pouvaient faire la queue au moins une fois dans leur vie, ils sentiraient peut-être ce sentiment d'injustice et de révolte que nous ressentons tous !” renchérit notre interlocuteur. Même situation à Illiltène, 30 kilomètres plus loin, où les fonctionnaires de la commune, les retraités et autres salariés n'avaient pas pu retirer leur argent dans la matinée, une somme limitée à 10 000 DA et les veuves de chahid n'ont pas été payées. À Tizi-Ouzou, au niveau de la poste Chikhi, une longue chaîne s'est installée avant 8h. L'un des deux distributeurs a été, selon des témoignages, saccagé pas un usager. Etait-il furieux face à une situation pour le moins inédite à une journée d'une fête attendue ou s'agit-il d'un acte de vandalisme injustifiable ? Du côté de l'ex-Mirabeau, dans la région de Draâ Ben Khedda, après avoir fonctionné durant la matinée, la poste avait eu une pénurie de liquidités dans l'après-midi, selon des usagers. Ces derniers étaient obligés de se déplacer au chef-lieu de wilaya ou vers d'autres chefs-lieux des communes limitrophes pour essayer de retirer leur argent. Une situation de blocage qui a fait que les achats ont été faits dans la précipitation, le citoyen étant livré aux spéculations de tous bords. La flambée des prix des produits alimentaires, fruits, légumes et viandes, sans parler des vêtements, a provoqué la hantise des chefs de famille. Si le lait reste “introuvable” sur les étalages, la pomme de terre, par exemple, avait atteint les 55 DA et plus le kilo, la tomate et la courgette ont été cédées à 80 DA le kilo. Le haricot vert, le piment et le poivron ont atteint les 140 DA le kilo. “On annonce le café à 800 DA/kg et le sucre à 150 DA/kg”, dira un commerçant. Une cherté de la vie qui fait peur à plus d'un et qui laisse les petites bourses de plus en plus perplexes. “Est-ce une fête ou une calamité ?” se plaint un vieillard sur les nerfs. “C'est les deux à la fois ! On peut en rire comme en pleurer.”