Le témoignage surprise du chef du MI6, Richard Dearlove, venu défendre un rapport gouvernemental sur l'arsenal irakien, a marqué la reprise lundi de l'enquête sur le suicide de David Kelly, alors que le ministre de la Défense, Geoff Hoon, sera rappelé la semaine prochaine. Interrogé par lien vidéo, sans montrer son visage, le chef du MI6 (renseignements extérieurs), Richard Dearlove, a déclaré que l'information selon laquelle l'Irak pouvait déployer des armes de destruction massive en 45 minutes, publiée dans un dossier controversé du gouvernement britannique de septembre 2002, provenait d'une “source établie et fiable”. Ce témoignage pourrait viser à faire taire les rumeurs de mésentente entre le Downing Street et les services secrets dans les mois avant le déclenchement de la guerre en Irak. C'est en tout cas la première fois que Sir Richard, dont on ne connaît pas le visage, aucune photo récente de lui n'ayant été publiée, témoigne dans une enquête publique. Le gouvernement de Tony Blair a reçu d'autres soutiens de poids, lundi, avec les comparutions des anciens numéros 1 et 2 du Service de renseignement militaire (DIS). ³Devant le juge Brian Hutton, Joseph Charles French et Tony Cragg ont fermement défendu ce même dossier de septembre 2002, minimisant les doutes émis par certains membres du DIS. “Certaines” inquiétudes avaient bien été relayées en haut lieu, avait estimé Brian Jones, un scientifique du DIS spécialiste des armes de destruction massive, lors de sa déposition devant l'enquête Hutton le 3 septembre. “Mais d'autres inquiétudes significatives ne l'ont pas été”, avait-il affirmé. Si le gouvernement Blair apparaît comme renforcé après les auditions de lundi, le ministre de la Défense devrait, lui, rester en ligne de mire jusqu'à la fin de l'enquête, prévue le 25 septembre. Déjà convoqué devant le juge Brian Hutton, le 27 août, Geoff Hoon va devoir revenir à la Cour royale de justice le 22 septembre, a annoncé un assesseur de Lord Hutton lundi, dès l'ouverture de la seconde phase de l'enquête. Certes, Geoff Hoon ne sera pas le seul témoin déjà convoqué à revenir pour une seconde audition. Alastair Campbell, le directeur de la communication de Tony Blair, démissionnaire depuis le 29 août, ou encore John Scarlett, le patron du JIC (Comité conjoint des services de renseignement), qui avait la responsabilité du dossier de septembre 2002 sur l'arsenal irakien, ont également été rappelés. Cette deuxième convocation publique n'en reste pas moins un coup dur pour le ministre de la Défense, mis en porte-à-faux par d'autres témoins lors des quatre premières semaines de l'enquête. Quant à la direction de la BBC, elle a évité lundi un mea culpa sur le reportage controversé du 29 mai de son journaliste Andrew Gilligan qui avait accusé le gouvernement Blair d'avoir “gonflé” la menace irakienne dans son dossier de septembre 2002. Greg Dyke, le directeur-général de la BBC a même contre-attaqué : les critiques d'Alastair Campbell, le directeur de la communication de Tony Blair, sur la BBC constituaient “une attaque qui, je pense, avait été planifiée”, a-t-il estimé devant le juge Brian Hutton. “L'un des buts possibles de cette attaque était peut-être d'éviter (qu'une commission parlementaire alors chargée d'analyser les conditions d'entrée en guerre de la Grande-Bretagne en Irak) se penche en détail sur le rôle d'Alastair Campbell dans l'élaboration du dossier de février” 2003 sur l'arsenal irakien, a-t-il argué. Ce dossier, unanimement qualifié de “louche” par la presse britannique, avait été en grande partie plagié, quasiment mot pour mot, fautes d'orthographes comprises, sur la thèse d'un étudiant américain de troisième cycle, vieille de 12 ans.