L'Egypte, considérée comme le porte-parole du monde arabe, devenant ainsi le premier allié de l'Occident au Moyen-Orient, crée actuellement, par ses émeutes, une situation bien embarrassante et pour le moins intrigante pour Washington qui ne sait plus sur quel pied danser. Le président Obama qui, à partir de la Maison-Blanche, a répondu jeudi à des questions de citoyens envoyées via Youtube concernant les grandes lignes de son programme, qu'il avait annoncé durant son discours sur l'état de l'Union, a confirmé son soutien au président Moubarak, faisant de son mieux pour ne pas se prononcer contre le peuple égyptien. “Le gouvernement (égyptien) doit être prudent de ne pas recourir à la violence, les citoyens dans la rue doivent aussi être prudents de ne pas recourir à la violence”, dit-il, comme si les deux parties étaient à armes égales, après avoir réitéré un soutien nuancé au président égyptien, expliquant : “Le président Moubarak a été d'une aide considérable sur une série de problèmes difficiles au Moyen-Orient, mais je lui ai toujours dit de s'assurer de faire avancer les réformes, les réformes économiques, les réformes politiques.” Hillary Clinton reprendra cette même formule vendredi à partir du siège du département d'Etat lors d'une conférence de presse, sans condamner la violente répression de la police égyptienne, qui a fait à ce jour de nombreux morts. La mise hors service des moyens de télécommunications concernant l'internet qui a interrompu “les appels au soulèvement”, via Facebook et Twitter, et la coupure des téléphones mobiles qui a considérablement réduit le champ de communication ont fait par contre l'objet d'une “presque condamnation”, étant traduite comme une atteinte à la liberté d'expression. Sur un ton ferme, la secrétaire d'Etat Hillary Clinton demandait au gouvernement égyptien, alors que l'armée égyptienne établissait le siège du Caire, d'Alexandrie et de Suez, “d'annuler les mesures sans précédent qui ont été prises de couper les communications”. Hillary Clinton avait aussi encouragé le dialogue entre le gouvernement et le peuple égyptien, alors que Mohamed Al Baradei, prix Nobel de la paix en 2005, qui était revenu en Egypte pour participer à une marche pacifique, avait été d'ores et déjà interpellé et mis sous résidence surveillée. Les inquiétudes de Washington s'expliquent d'elles-mêmes. Le président Hosni Moubarak a depuis 30 ans garanti le traité de paix avec Israël (1979), devenant aussi un partenaire incontournable pour l'implémentation de la stratégie américaine dans la région. La perte de Moubarak pourrait rompre les alliances déjà établies et surtout provoquer une nouvelle distribution des cartes dans la région, avec un Iran, à même de se doter d'armes de destruction massive, cherche depuis une dizaine d'années à s'imposer dans la région. Zvi Handel, un ex-parlementaire israélien, est intervenu dans le Jérusalem Post en soutenant que le départ de Moubarak “pourrait mener à un conflit qui sera désastreux pour l'économie égyptienne et pour les relations (de l'Egypte) avec les Etats-Unis”, lançant ainsi un avertissement aux Egyptiens pour les inciter à faire le bon choix de leader pour le cas où Moubarak viendrait à quitter le pouvoir, alors que le gouvernement israélien se disait concerné et observant “de près la situation en Egypte” par l'intermédiaire de Yigal Palmor, son ministre des Affaires étrangères. Vendredi soir, suite au discours pédant du président Hosni Moubarak à la télévision égyptienne, qui apparaissait pour la première fois depuis le déclenchement des émeutes et qui n'a pas hésité tout en s'appuyant sur le Constitution d'user du leitmotiv des dictateurs donnant “la main étrangère” comme raison des événements sanglants que connaît l'Egypte, la Maison-Blanche, qui selon de hauts fonctionnaires n'avait pas du tout apprécié l'allocution télévisée du président égyptien, a finalement décidé de durcir le ton sans toutefois lâcher définitivement Moubarak. Le président Obama, après s'être entretenu avec ce dernier pendant une demi-heure, était apparu l'air outré devant les médias. “Quand le président Moubarak s'est adressé aux Egyptiens ce soir, il a promis une meilleure démocratie et une plus grande opportunité économique. Je viens de lui parler, après son discours, et je lui ai dit qu'il a la responsabilité de donner un sens à ces mots, de proposer des étapes concrètes et des actions, pour tenir cette promesse. La violence ne résoudra pas les revendications du peuple égyptien”, a déclaré le président Obama.