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Gibran Khalil Gibran du Prophète Mohammed à la diva Faïrouz
Souffles…
Publié dans Liberté le 18 - 08 - 2011

Malheur à la nation qui se vêt de ce qu'elle n'a pas tissé, qui mange ce qu'elle n'a pas semé, qui boit ce qu'elle n'a pas pressé… Malheur à la nation, dont les hommes raisonnables sont muets, les forts aveugles et les habiles bavards. Gibran Khalil Gibran
Depuis plus d'un siècle Gibran Khalil Gibran, également orthographié Jobran Khalil Jobran (1883-1931), qu'importe la manière d'écrire le nom, symbolise, pour le champ culturel et littéraire arabe, un vrai mythe humain. Une fable vivante. Un phénomène exceptionnel. Dans la mémoire collective, il effleure le réel et le virtuel, l'historique et le fantastique. D'une génération à l'autre, cela dure depuis plus d'un siècle, Khalil Gibran, par ses écrits, demeure le seul et unique écrivain arabe qui a pu rassembler autour de sa personnalité et ses écrits toutes les sensibilités : politiques, religieuses et linguistiques. Tout au long du vingtième siècle, aucun écrivain maghrébin ou arabe n'a échappé à l'influence de Gibran. Tous, sans exception aucune, sont sortis du manteau de Gibran. De Rachid Mimouni à Kamel Daoud et de Abdelhamid Benhadouga à Ahlem Mostaghenemi, de Mohamed Arkoun à Tahar Benjelloun…fascinés, les écrivains de tout horizon défilent inclinés devant ce géni inégalé: Poète rebelle, prosateur rénovateur et insoumis, peintre provocateur, séducteur. L'influence de Gibran Khalil Gibran ne se limite pas uniquement aux hommes de lettres. Les politiques eux aussi n'échappent pas à cette règle. En lisant des entretiens avec des hommes politiques de gauche, de droite ou des islamistes, nous constatons qu'ils étaient tous ou presque bercés par les écrits de Gibran Khalil Gibran. De Nasser à Houari Boumediene, d''Abdelhamid Mehri à Abdelaziz Belkhadem passant par Abou Djerra Soltani ou Hadi Al-Khaldi et même Ali Benhadj …. Gibran Khalil Gibran fut pour eux un passage obligé dans leurs expériences de lecteur. C'est curieux ! À l'école, quand l'école fut une vraie école, dans nos livres scolaires, quand les programmes scolaires étaient des vrais programmes, dès qu'on commence à décrypter et à déguster les premiers textes en arabe, nous nous trouvons fascinés par ceux de Gibran Khalil Gibran. Des textes en prose et on les apprenait comme de la poésie. Un siècle durant, Gibran Khalil est le seul écrivain arabe qui a pu réunir un lectorat sans couleur politique ou religieuse, de droite à gauche, de gauche à droite, laïc ou islamiste. Au Maghreb comme au Machreq, chez les musulmans comme chez les chrétiens, l'image de Gibran Khalil Gibran, est le produit d'un imaginaire rythmé entre le religieux et le blasphématoire. L'ange ou le diable ? En 1903, son livre protestataire Les âmes rebelles à été brûlé publiquement par les autorités turques. Son œuvre magistrale Le Prophète publié en 1923 écrit en anglais se lit et continue à être lue comme le Coran ou la Bible. Il est considéré comme l'un des livres les plus vendus et les plus traduits dans le monde : de l'allemand jusqu'au tamazight. D'où et comment Gibran Khalil Gibran a construit son énigme et son mythe ? D'abord par et dans l'arabe qu'il a révolutionné. Il écrivait dans un nouvel arabe faisant rupture avec la rhétorique azharienne. Par son courage intellectuel, il n'a cessé de condamner la répression, le sous-développement oriental et le conservatisme religieux de tous bords, notamment chrétien et musulman. Par sa vie privée pleine de voyages et d'aventures, traversée par une relation d'amour passionnée et passionnante avec l'écrivaine palestinienne May Ziyadeh (1886 – 1941). Un amour qui dure toute leur vie, et pourtant ils ne se sont jamais rencontrés. Ils entretenaient une correspondance permanente et inaccoutumée, dont les lettres échangées entre eux sont considérées comme des perles littéraires.
Par sa peinture qui a conjugué la poésie au mythe, le sacré au profane, le nu au voilé. Par son imagination hors pair, il est allé jusqu'à la réalisation d'un portrait du prophète Mohamed (Qsssl). C'est à la diva Faïrouz, une autre fable libanaise, qui a interprété des fragments du Le Prophète et autres textes, que revient une partie de la sacralisation de Gibran Khalil Gibran et qui perdure.
A. Z.
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