Le projet de loi organique portant code électoral ne sera certainement pas adopté par les membres de la Chambre basse dans la version élaborée par le gouvernement. La commission des affaires juridiques, administratives et des libertés de l'APN a remis aux députés, hier matin à l'ouverture de la plénière consacrée à la présentation du projet de texte par le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales et au débat général, son rapport préliminaire décliné en trois volumes. Pour dire le nombre important des amendements qu'elle a introduits au texte, tant sur la forme que dans le fond. En premier lieu, la commission permanente de l'Assemblée nationale a enlevé du projet de texte l'article 67, qui déchoit de son mandat, l'élu à APN, à l'APW ou à l'APC, qui fait dissidence de son parti pour intégrer un autre. Cet amendement a sorti de ses gonds le groupe parlementaire du Parti des travailleurs, qui a subi au cours de cette législature une véritable saignée de ses élus l'ayant quitté pour se mettre dans le giron d'autres formations politiques, particulièrement le FLN et le RND. “Nous voyons là un signe inquiétant de la volonté du parti majoritaire de transformer les réformes en contre-réformes. Mettre fin à la transhumance politique, c'est rendre service à la démocratie et garantir la souveraineté du choix des électeurs qui votent sur une liste d'un parti et non pas sur des personnes”, a déclaré M. Taazibt, chef du groupe parlementaire du PT, aux journalistes. Le député a estimé, par ailleurs, qu'aucune loi ne peut “régler des questions politiques”. Il faisait là référence à l'article 144, dans lequel la commission a renforcé la disposition qui interdit aux candidats, en lice pour l'élection présidentielle, de se retirer de la course électorale dès lors que leur candidature a été validée par le Conseil constitutionnel. “La loi ne doit pas entraver la volonté d'un parti ou d'une personnalité de prendre une position politique”, a expliqué M. Taazibt. à ce propos, les élus FLN ont une opinion différente. “C'est une question de morale politique. Se retirer à la veille d'une élection porte automatiquement atteinte à sa crédibilité”, a soutenu M. Si Affif, député de l'ex-parti unique. Le PT juge, par ailleurs, que les mécanismes de surveillance des élections, prévus dans le projet du gouvernement, sont insuffisants. “Nos amendements feront en sorte que l'administration n'organise pas les élections. Nous sommes aussi contre la multiplication des commissions de surveillance, qui ne servent, à notre avis, qu'à diluer les responsabilités”, a-t-il poursuivi. Ali Brahimi, député de Bouira dissident du RCD, a affirmé qu'il ne peut y avoir de grands changements dans le contrôle des scrutins, du moment que “l'appareil judiciaire, auquel est confié une partie du processus électoral reste sous la dépendance étroite de l'exécutif”. La commission parlementaire a, pour sa part, mis un magistrat à la présidence de la commission électorale de la commune. Cette instance a également amendé l'article 89 de telle manière à circonscrire l'élection du P/APC et P/APW aux seuls élus du parti majoritaire. Cette fois-ci, c'est le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Daho Ould Kablia, qui remet en cause cet amendement vague et confus de son avis. “De quelle majorité parle-t-on ? Celle des voix obtenues ou des sièges ? En cas d'égalité entre deux ou trois listes, comment procéder ?” s'est-il interrogé. Lors du débat général, des députés ont jugé inconvenant d'exclure une partie des élus de l'opération de vote sur le président de l'assemblée locale. La commission des affaires juridiques, administratives et des libertés de l'APN a modifié, également, l'article 93 afférent aux conditions d'éligibilité des candidats à la députation, en relevant le nombre d'années d'ancienneté de la nationalité acquise de 5 à 8 ans. Elle a gardé, néanmoins, tel quel le dernier alinéa qui astreint les membres du gouvernement, candidats potentiels aux élections législatives, de déposer leur démission trois mois au moins avant le jour du vote. Le groupe parlementaire du FLN, qui détient plus de la moitié des portefeuilles ministériels, ne compte évidemment pas sacrifier ses ministres. Selon M. Si Affif, le Front propose de ramener le délai à 45 jours. “Il faudra surtout savoir comment appliquer cette disposition. Est-ce que les ministres doivent démissionner ou se faire remplacer ?” Le débat est ouvert.