L'accord sur une transition politique en Syrie, obtenu à Genève au cours de la réunion du Groupe d'action sur la Syrie, est imprécis. Vu de près, ce n'est que la confirmation du plan Annan qui, normalement, devait être jeté aux orties pour son échec. La nouveauté est que ce plan bis de l'Onu ouvre en théorie la voie à l'ère post-Assad. En théorie, car la Russie et la Chine ont réaffirmé qu'il revenait aux Syriens de choisir leur avenir ! Une prime à la poursuite de la féroce répression exercée par le régime de Damas contre son propre peuple et qui en 16 mois a causé près de 16 000 morts, en majorité des civils, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme. Si dans ce Groupe d'action sur la Syrie, constitué par Kofi Annan, les chefs de la diplomatie des trois membres permanents du Conseil de sécurité (Etats-Unis, France et Grande-Bretagne), de pays représentant la Ligue arabe (Irak, Koweït et Qatar), de la Turquie et les secrétaires généraux de la Ligue arabe et de l'ONU ainsi que la Haute représentante aux Affaires étrangères de l'Union européenne se sont félicités de la perspective de chasser Bachar al-Assad du pouvoir, les ministres russe Sergueï Lavrov et chinois Yang Jiechi ont souligné que ce gouvernement ne peut être imposé de l'extérieur. Une transition du pouvoir en Syrie doit être décidée par les Syriens, a indiqué le ministre russe des Affaires étrangères. Sergueï Lavrov a encore rejeté fermement tout recours au chapitre VII de la Charte des Nations unies, qui inclut le possible recours à la force, évoqué par les Occidentaux pour faire pression sur la Syrie. La Chine a adopté la même position. Et au texte de poser la manière précise avec laquelle le travail de transition sera mené et décidé par les Syriens eux-mêmes. Autant dire que ce n'est pas demain que partira le régime syrien. D'ailleurs, au terme de la conférence de Genève, la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton s'est dite pas du tout naïve concernant l'éviction d'al-Assad : “Je sais que ce sera difficile." Kofi Annan a également souligné que l'avenir de Bachar al-Assad sera l'affaire des Syriens. En effet, quelle serait l'opération tant que celui-ci bénéficie du parapluie russo-chinois ? La guerre civile ! Mais la Syrie est en plein dedans. D'où cette plage ouverte à des membres actuels du gouvernement al-Assad dans le future attelage de la transition. Mais est-ce suffisant pour ouvrir la nécessaire grande brèche qui doit signer la chute du régime ? Pas évident dans les conditions actuelles : jusqu'ici, les dignitaires qui ont abandonné Damas se comptent sur les doigts des deux mains. Toujours Hillary Clinton, plus au fait des rapports de force et de la realpolitik que ses homologues européens et du Golfe arabe : la communauté internationale doit encore compter sur l'embargo et la pression sur les soutiens d'al-Assad pour faire évoluer ce qu'elle a appelé “la dynamique interne" du conflit. C'est-à-dire parvenir à l'éclatement du régime. D'où la montée en cadence de livraisons d'armes à l'armée de la rébellion, payées cash par Riyad et le Qatar. Donc, voilà un nouveau texte qui parle de dialogue national sans comporter de conditions préalables au lancement de ce processus. L'organe du gouvernement transitoire qui exercera les pouvoirs exécutifs pourra inclure des membres du gouvernement actuel et de l'opposition et d'autres groupes, et doit être formé sur la base d'un consentement mutuel. Et il faut mettre un terme aux effusions de sang, selon le premier plan Annan en 6 points, avec notamment le cessez-le-feu. Des vœux pieux qui ont fait dire au même Annan qu'il espérait des résultats d'ici un an ! Alors que d'autres Syriens vont mourir et les plus chanceux rejoindre les camps de réfugiés en Turquie et au Liban, le Groupe d'action sur la Syrie va rester en contact et se réunira selon les développements. D B