Quand un politique américain entre dans son bureau pour lui demander à quoi sert l'Africom, le général David Rodriguez lui montre une carte de l'Afrique où les pays sont remplacés par une dizaine de cartes du Texas. Juste pour lui montrer l'étendue du continent africain dont il a la charge en tant que commandant en chef de forces américaines en Afrique. Huit mois après sa nomination, le général Rodriguez s'est rendu compte que diriger l'Africom n'est pas une mince affaire. Face à la méfiance des dirigeants et des peuples africains, le niveau déséquilibré entre les armées africaines, la suspicion du Congrès US qui s'interroge sur son utilité et les coupes budgétaires sombres de l'administration Obama, la nomination de cet ex-parachutiste n'est pas un cadeau. Il faut dire que diriger l'Africom équivaut à un siège éjectable. Son prédécesseur, le général William Ward a payé son goût pour le luxe quand l'ex-secrétaire du département de la Défense Léon Panetta l'a démis de ses fonctions en 2011 pour "dépenses excessives" et après avoir pris un cliché avec l'acteur Denzel Washington, à la sortie d'un théâtre à Broadway. Le général Ward a été dégradé d'une étoile, a été condamné à rembourser 82 000 dollars au Pentagone et sa retraite a été amputée de 30 000 dollars. Il faut dire que la facture était salée pour l'Africom puisque les investigations de la défense américaine ont calculé que les voyages du général Ward avec son épouse aux Bermudes et dans des hôtels 5 étoiles à travers les états-Unis avaient coûté au contribuable des sommes considérables. Le départ de son successeur, le général Carter Ham a été aussi brutal. N'ayant passé que 36 mois à la tête de l'Africom, le général Ham a été la victime collatérale de l'attaque de Benghazi. Ayant été la premier à se dire disposé à envoyer une unité d'élite sur place, il s'était, paradoxalement, vu accusé de ne pas avoir été assez réactif ! Malgré son travail de réhabilitation de l'Africom, après le scandale Ward, Ham a été sacrifié afin de sauver plus importante que lui. En l'occurrence Hillary Clinton, prise dans la tourmente de cette affaire, et qui avait failli entraîner le président Obama, en pleine campagne de réélection, dans sa chute. Ham a été le parfait fusible. Pour toutes ces raisons, le général Rodriguez s'est présenté avec un discours consensuel, lisse et sans aucun éclat. Cet ancien parachutiste, rompu à l'action en Afghanistan, semblait un peu ennuyé par l'exercice qui consiste à affronter des journalistes algériens et mauritaniens lors d'une conférence de presse à Stuttgart. Son discours axé sur le partenariat et la formation n'était qu'une répétition finale de ce qu'a dit son staff. Pour l'Algérie, où il n'a même pas fixé de date de visite (son aide de camp lui soufflera que c'est début 2014), il se contentera d'égrener les poncifs habituels. Concernant les relations avec l'ANP, le général Rodriguez dira : "Je ne sais pas les requêtes spécifiques de l'Algérie. Mais la plupart des partenaires africains sont assez précis comme le commandement et le contrôle ainsi que les moyens de télécommunication et les renseignements qui découlent des reconnaissances aériennes. Comment contrer les bombes à distance." Nous apprendrons seulement que l'Algérie a demandé des véhicules qui résistent aux charges artisanales, comme ceux que l'US Army a trouvé en Irak et en Afghanistan. Sur les rumeurs concernant la possible dissolution de l'Africom, le général Rodriguez a balayé cette question en estimant que "l'Africom va demeurer active, probablement plus petite et avec moins de moyens, mais nous continuerons de travailler avec nos partenaires africains avec la même intensité". Le général Rodriguez d'une voix monocorde et un accent texan veut inscrire l'Africom dans une autre phase. Celle du profil bas sur leurs ambitions africaines. Il est devenu évident que le général Rodriguez n'est pas du genre à aimer les films de Denzel Washington. M. B. Nom Adresse email