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Au troisième jour de l'enlèvement d'un retraité
Grande mobilisation et consternation à Ath Zmenzer
Publié dans Liberté le 17 - 07 - 2014

À Ath Zmenzer, la population ne baisse pas les bras. Elle se mobilise à chaque fois que cela est nécessaire, mais elle semble encore traumatisée par le lâche et horrible assassinat qui a suivi l'enlèvement d'Amirouche Mebrek, fin janvier dernier.
Ni magasin ouvert ni circulation automobile et piétonne, hier, à Ath Zmenzer qui donnait l'impression d'être désertée par ses habitants.
Le chef-lieu de cette commune, située à 15 kilomètres au sud de la ville de Tizi Ouzou, a été paralysé par la grève générale à laquelle avait appelé, la veille, la cellule de crise mise sur pied par les comités de village suite à l'annonce de l'enlèvement du retraité, Amar Gada, lundi dernier, dans la matinée.
À Alma, cette petite agglomération de montagne qui sert de chef-lieu communal, il n'y avait, hier, que de la consternation, dans une atmosphère déjà suffocante en raison du pic de température atteint dès les premières heures de la matinée. Bien que silencieuse et contenue, la colère se lisait sur tous les visages de ces hommes et de ces femmes rassemblés devant la demeure des Gada. Ils étaient là depuis la matinée. En attendant le départ, prévu à 14h, de la caravane qui sillonnera, malgré la canicule, les localités voisines de Souk El-Tenine, Maâtkas, Béni Douala et Ihesnaouène, pour sensibiliser et réclamer la libération de l'otage, ils se sont rassemblés par centaines, le regard dans le vide pour certains, chuchotant pour d'autres, à l'ombre de la bâtisse des Gada qui ne laisse aucun signe de richesse particulière. "Libérez Dda Amar", est-il écrit en noir sur une banderole blanche accrochée à quelques mètres de la porte d'entrée. "Halte aux kidnappings", lit-on sur une autre banderole accrochée un peu plus loin, vers la sortie de l'agglomération. "Nous demandons la libération d'Amar Gada sain et sauf", nous dira le président d'un des comités de villages formant la coordination.
Des nouvelles de la victime ? "Aucune", répondent les membres de la cellule de crise et de la famille. Les ravisseurs n'ont pas contacté la famille depuis lundi dernier lorsqu'ils ont confirmé l'enlèvement de ce retraité de 67 ans dans son champ situé non loin du village. Une demande de rançon ? En confirmant l'enlèvement, la voix au téléphone avait clairement expliqué qu'il s'agissait d'une affaire d'argent, répond-on dans l'entourage de la victime. Comme à l'accoutumée, les ravisseurs compteraient encore monnayer la libération de l'otage. La population dit "non". Mais, cette fois-ci, avec beaucoup de prudence et de vigilance. Le langage est modéré. Point de condamnation. À Ath Zmenzer, la population ne baisse pas les bras. Elle se mobilise à chaque fois que cela est nécessaire, mais elle semble encore traumatisée par le lâche et horrible assassinat qui a suivi l'enlèvement d'Amirouche Mebrek fin janvier dernier. Mais pas que cela. Elle se sent surtout abandonnée. Comme jetée en pâture. "Qu'on soit abandonné par l'Etat, cela n'a rien de nouveau, mais aujourd'hui, même les institutions populaires sont indifférentes", nous dira un sexagénaire qui fera remarquer que tout comme les autorités administratives, aucun élu de l'APW, aucun député, aucun représentant de parti politique ne se sont présentés chez la famille de la victime pour leur exprimer la moindre solidarité ou s'enquérir de la situation. "L'Etat est le premier responsable de cette situation", lâche un autre citoyen. Pour lui, il est vrai que dans la soirée de cet enlèvement des troupes de l'ANP et de la BMPJ se sont rendues dans la région mais, s'est-il interrogé, est-il suffisant d'agir en aval pour des résultats connus à l'avance ?
En effet, en avril 2013, au lendemain de la libération de l'otage Kahil Yazid, un jeune voisin de l'actuel otage, la population d'Ath Zmenzer qui revendiquait déjà auparavant une structure de sécurité s'est rassemblée devant le siège de la wilaya pour exiger à nouveau un déploiement sécuritaire effectif dans leur localité. Une exigence tombée, à l'évidence, dans l'oreille d'un sourd puisque, plus d'une année plus tard, aucune structure n'est réalisée. Entre-temps, les vols, agressions, enlèvements, assassinats continuent de faire partie du quotidien des habitants qui ne cessent, eux, de s'interroger pourquoi les kidnappings n'ont lieu que dans la wilaya de Tizi Ouzou où Amar Gada est le 77e ? Pourquoi ce genre d'actes criminels n'est jamais enregistré lors des périodes électorales ? Et surtout pourquoi l'Etat, avec tous les moyens dont il dispose, n'a jamais réussi à libérer un otage et malgré ses moyens de localisation des communications n'est jamais parvenu aux ravisseurs qui n'hésitent pourtant pas à communiquer pour formuler des demandes de rançon ?
En attendant des réponses à ces questions ou que ce phénomène cesse, ce sont les entrepreneurs, commerçants et industriels qui continuent de délocaliser leurs activités vers d'autres wilayas plus clémentes du pays, générant ainsi une dynamique de désinvestissement créateur de... chômage.
S. L.
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