“UGTA-gouvernement : vers le bras de fer.” Il y aura toujours quelques naïfs pour s'alarmer de l'embrasement du front social que cette “ouverture” de Liberté annonçait hier. “La rentrée s'annonce chaude”, titre Le Soir d'Algérie du même jour. Les deux suggèrent quelque intransigeance de la Centrale sur le dossier de la permanisation de centaines de milliers de fonctionnaires et, bien sûr, sur celui de la prise en compte des indemnités de zone des travailleurs de Sonatrach dans le calcul des retraites. Les deux quotidiens se réfèrent à des “sources syndicales” et offrent ainsi à Sidi Saïd, qui n'a rien dit, un voyage médiatique à moindre frais. C'est devenu chronique : à chaque fois que des travailleurs se mettent à revendiquer, la direction de l'UGTA survient, hausse le ton, parfois par presse interposée, surenchérit pour déposséder les collectifs requérants de leurs doléances, et s'en va justifier son existence et son budget à la prochaine bipartite. Quand la protestation n'émane pas des structures affiliées au syndicat du pouvoir, le procédé est adapté pour s'emparer astucieusement de la protestation sociale. Souvenons-nous de la grève des enseignants : les syndicats autonomes se mobilisent, leurs adhérents se sacrifient, puis la FNTE-UGTA menace et négocie, obtient naturellement satisfaction pour quelques fragments de revendications et le tour est joué. La connivence se substitue à la lutte sociale et la désarme. Le tout entretient un rapport de collusion entre le gouvernement et le syndicat unique : l'allocation autoritaire du produit national intéresse autant les instances du pouvoir que les “organisations de masses” résiduelles. “Pétrole contre paix sociale”. Tel semble être le marché entre ces organisations socioprofessionnelles, plus professionnelles que sociales, qui assurent les représentations rituelles de fin de saison : les protestations de la rentrée sont parasitées par un dialogue sourd que la presse reconstitue et qui devrait connaître son périlleux épilogue avec la fameuse bipartite. On retient son souffle avant que tout ne se dégonfle. L'irritation théâtrale médiatiquement accompagnée est censée prouver l'obsessionnelle préoccupation de la Centrale pour les intérêts des travailleurs, de tous les travailleurs, quitte à assumer le désaccord, voire la brouille avec le gouvernement. La bipartite en devient le moment critique et tant attendu de la rentrée. Les quelques concessions sociales programmées prennent l'allure de palmes remportées par la Centrale nationale. Par ailleurs, on pense que l'utilité politique de l'UGTA, régulièrement prouvée au fil des échéances électorales, vaut bien quelques largesses sociales qui la légitimeraient. Le programme est que, même si ce n'est qu'un mauvais film, cela reste un film d'angoisse dont on pourrait se passer, par ces temps d'anxiété. M. H.