Selon le syndicat, le secteur privé est dans la phase de “recherche de ses équilibres financiers”. Le Conseil national des enseignants du supérieur (Cnes) affermit sa position sur la question de l'ouverture de l'Université algérienne aux investissements privés. “Le président de la République a moins parlé de privatisation de l'université que d'ouverture du champ de l'enseignement supérieur à l'initiative privée. Le secteur privé n'a ni les capacités ni la vocation de constituer une alternative au secteur public”, a précisé hier Ali Boukaroura, le coordinateur national du syndicat. Selon lui, l'incapacité actuelle du secteur privé s'explique par le fait que celui-ci est encore dans la phase de “recherche de ses équilibres financiers”. “Par principe, le Cnes n'est pas contre la participation du privé dans les œuvres universitaires à la rigueur, comme l'hébergement, la restauration, le transport, etc. Mais, l'université reste avant tout du ressort de l'Etat”, a soutenu fermement le leader syndical, en ajoutant : “La privatisation totale de l'université signifie sa destruction. Nous ne pouvons pas imaginer l'Etat se désengager par rapport à l'éducation et à l'enseignement supérieur, deux secteurs stratégiques qui sont sa raison d'être.” Une autre précision est apportée par le responsable du Cnes : “Le caractère public de l'université algérienne n'est pas vraiment mis en question. En revanche, ce qui est en question, c'est l'évolution du niveau de formation global et la mesure dans laquelle la désétatisation peut conduire au redressement d'un tel niveau. Autrement dit, nous ne croyons pas que la dégradation de ce niveau de formation soit liée au caractère public de la formation. Le privé ne peut donc réussir là où l'Etat a failli.” À ceux qui prétendent que, dans le contexte de mondialisation, la privatisation de l'université est incontournable, Ali Boukaroura signe et persiste : “Il n'y a pas d'alternative crédible à l'engagement public, concernant l'offre de formation supérieure. Le rôle du privé ne peut être que complémentaire.” D'après le numéro un du Cnes, l'absence de stratégie publique en matière de formation et de diffusion du savoir, “ne pourra être palliée par une offre privée” et le lancement d'un partenariat avec des universités étrangères “ne pourra lui en apporter la solution”. “L'Etat ne peut se soustraire à sa responsabilité ; tout dépend au contraire de son engagement, qui n'est pas forcément matériel : la participation privée et internationale sera d'autant plus ferme que la vision publique sera plus assurée”, a encore indiqué M. Boukaroura. Pour ce qui est du marasme vécu par l'Université algérienne, le Cnes a son mot à dire, y compris sur une sortie de crise. “Nous sommes en présence de deux issues possibles qui poussent l'université à s'adapter face à l'évolution de la demande sociale et à l'offre mondiale en matière de formation. Dans un cas, nous assisterons à la mise en place d'une université à deux vitesses : l'une pour les riches et l'autre pour les pauvres”, a expliqué son coordinateur national. Selon lui, dans la première université, l'effort de l'Etat serait “enrichi par un apport privé”, alors que la seconde continuerait de faire dans “la démocratisation de masse, avec les contraintes que l'on sait”. “Il est évident que cette issue s'imposera d'autant plus facilement que seront faibles ses opposants, les défenseurs de l'autre voie. Dans un autre cas assez hypothétique dans notre conjoncture politique, il s'agira de déterminer dans quelle mesure les ressources privées et publiques disponibles pour une formation supérieure, pourront être mobilisées afin d'élever le niveau global de formation et produire de la cohésion sociale”, a déclaré Ali Boukaroura, avant de conclure : “Pour le reste, l'opposition entre le privé et le public est, pour nous, un faux débat hors opposition entre l'investissement de court terme et celui du long terme”. H A