Des affrontements ont opposé samedi dernier, pour la seconde nuit consécutive, de jeunes manifestants aux forces anti-émeutes dépêchées de Ghardaïa, Laghouat et Hassi R'mel. Bien que les raisons des troubles soient différentes, l'effet de contagion y est pour beaucoup dans le déclenchement d'émeutes à Guerara. Depuis vendredi soir, cette commune, située à 110 kilomètres du chef-lieu de la wilaya, a pris le relais de sa voisine Ghardaïa en devenant le théâtre d'échauffourées sporadiques entre de jeunes manifestants et les forces de l'ordre. Samedi soir, pour la seconde nuit consécutive, des affrontements violents ont entraîné l'interpellation de sept personnes. “Les notables de la ville ont pu obtenir leur libération, d'autant que la majorité est mineure”, révèle M. Khiat, membre élu de l'assemblée communale. La veille, l'initiative des élites locales s'est avérée infructueuse, puisque tous les jeunes arrêtés (au nombre de sept également) ont été transférés à la prison de Ghardaïa. Ils sont allés grossir les rangs des trente détenus de Ghardaïa incarcérés au motif d'avoir pris part à l'attroupement des commerçants locaux et participé au saccage des infrastructures publiques. Onze ont été condamnés mardi dernier à quatre mois de détention ferme. Onze autres, devant comparaître devant la juridiction pénale, encourent des peines plus lourdes. Si les habitants de la vallée du M'zab ont réagi à ce verdict en organisant un rassemblement devant le tribunal, les jeunes de Guerara sont allés plus loin. Vendredi dernier, dans la nuit, ils ont investi le siège de la cour, sorti les meubles et les ont brûlés sur la chaussée. Sans doute ont-ils voulu prévenir par ce geste symbolique le traitement qui sera infligé à ceux d'entre eux qui seront pris dans les filets de la police. Un tel acte témoignait également de leur déconsidération pour la justice et ses différents appareils. La preuve en est qu'un groupe parmi eux s'est adressé à la police pour lui demander réparation, sans que sa requête soit prise en compte. Et c'est cela qui déclenchera les émeutes. Toujours vendredi dans la soirée, des jeunes mozabites engagés pour assurer leur tour de garde dans le quartier Cheikh Mohamed El-Mouadin — la garde étant une pratique séculaire dans le M'zab — sont pris à parti par des individus appartenant à la communauté malékite. Selon M. Khiat, les provocateurs sont venus dans l'esprit de se venger suite à l'interpellation quelques jours plus tôt d'un des leurs pris en flagrant délit de vol. S'ensuit une rixe. Les sentinelles décident alors de prévenir la police. Mais les agents de l'ordre restent sourds à leur plainte. La tension monte. Et cette énième goutte fait déborder le vase. Déjà nourris de nombreux ressentiments, les jeunes mozabites cèdent à la violence. Une foule nombreuse investit la place centrale de la ville ou se trouvent le commissariat, la mairie et le palais de justice. Armée de pierres, elle cible les différents édifices. L'éclairage public n'est pas épargné. Avant l'aube, des brigades antiémeutes, dépêchées de Ghardaïa, Laghouat et Hassi R'mel, arrivent à Guerara. Jusqu'à hier, le dispositif de sécurité n'était pas encore levé. Pour cause, bien que le wali se soit déplacé dans la commune, il n'est pas parvenu à désamorcer la situation. Outre les personnes interpellées, on dénombre de nombreux blessés parmi les manifestants. À ce jour, ni l'arbitrage du wali, ni les tentatives de règlement des notabilités n'ont pu porté leurs fruits. La tension est toujours vive d'autant qu'à l'instar de Ghardaïa, Guerara compte des détenus. Dans le sud du pays, ils tendent à devenir légion. À Ouargla, aura lieu, aujourd'hui, le procés de dix représentants du mouvement des archs du sud dont son porte-parole Hafnaoui Ghoul ainsi que son jeune frère. S. L.