Il faut se débarrasser du tonneau des Danaïdes. La quasi-totalité des entreprises publiques ont été “assainies” financièrement par l'Etat propriétaire, certaines d'entre elles plusieurs fois, mais la thérapie a eu l'effet d'un cautère sur une jambe de bois. Le désherbage de la Maison Algérie ne finira donc jamais. À entendre ces cris d'orfraie poussés par une meute d'imprécateurs déstabilisés par l'assèchement programmé des sources de la rente, le chiendent restera longtemps cette indéracinable mauvaise herbe fichée au cœur du jardin de la collectivité nationale. C'est visiblement la panique dans les milieux, anormalement encore nombreux, qui ont fait de la défense du secteur économique public un métier très rémunérateur. Depuis la publication de la liste des entreprises à privatiser, on assiste à une incroyable levée de boucliers de fédérations syndicales et de quelques rares personnalités politiques connues, elles, pour leur dogmatisme sur la question. Cette solidarité dans un combat d'arrière-garde, et de toute façon perdu d'avance, est révélatrice à la fois du degré de prégnance de la culture de la rente et de l'obligation, pour le gouvernement, de s'en tenir fermement au programme des privatisations arrêté et d'en accélérer l'exécution. À court d'arguments, pris au piège de leur propre duplicité érigée en système défensif, les éternels et faux défenseurs du secteur public ne peuvent plus dire aujourd'hui qu'ils sont pour l'économie de marché. Ils ne peuvent pas l'être dès lors qu'ils en refusent le principal et plus essentiel fondement. À l'heure des échéances, ils ont abattu leurs cartes. Les pendules ont assurément besoin d'être remises à l'heure. Et les vérités d'être dites. Primo, les entreprises publiques ne sont pas la propriété des syndicats ni de leurs dirigeants. Elles appartiennent à l'Etat, puisque c'est le Trésor public qui bouche leurs trous financiers et paye les arriérés de salaires. C'est donc beaucoup d'argent en moins pour la collectivité nationale qui est en droit de refuser de supporter plus longtemps cet effort. Il faut se débarrasser du tonneau des Danaïdes. La quasi-totalité des entreprises publiques ont été “assainies” financièrement par l'Etat propriétaire, certaines d'entre elles plusieurs fois, mais la thérapie a eu l'effet d'un cautère sur une jambe de bois. Cet “assainissement” a un coût : des dizaines de milliards de… dollars ! Secundo, l'Etat doit impérativement vendre ses entreprises, parce que c'est le seul moyen d'améliorer les exportations hors hydrocarbures, grâce à l'apport du know-how et de l'argent frais des partenaires étrangers, notamment. Du reste, il existe à présent des exemples réussis de privatisation d'entreprises qui étaient devenues des boulets pour l'Etat. C'est le cas, notable, de Sider — sidérurgie —, dont les milliers de travailleurs et le syndicat UGTA sont très satisfaits du repreneur indien. Tertio, les Algériens ont retrouvé leur dignité en tant que consommateurs grâce à l'ouverture économique, et n'accepteront pas de revenir au marché administré, synonyme d'humiliations, de pénuries, de vente sous le comptoir, de marché noir et de corruption. A. H.