La promptitude du président de la République à légiférer par ordonnance a poussé le Front des forces socialistes (FFS) et l'Alliance verte au boycott, jeudi dernier, de la séance plénière consacrée au vote du projet de loi portant approbation de l'ordonnance relative à la loi de finances complémentaire 2015, l'ordonnance n°15-02 modifiant et complétant l'ordonnance n°155-66 portant code de procédure pénale et le projet de loi d'orientation sur la recherche. Le FFS n'est pas à sa première action de protestation contre le fonctionnement de l'Assemblée nationale. Les députés de ce parti avaient déjà boudé la reprise des travaux du Parlement au début de cette session d'automne, estimant que légiférer sur la loi de finances complémentaire et l'amendement du code pénal durant l'intersession parlementaire confirme l'hégémonie de l'Exécutif sur le Législatif. Le chef de l'Etat s'est illustré depuis son arrivée à El Mouradia par un recours presque systématique à l'ordonnance présidentielle. Pour preuve, il est arrivé que cinq ordonnances soient soumises au vote en une seule séance plénière. Et ce, sans motif d'urgence, privant ainsi les députés de leur droit de débattre et d'apporter des amendements opportuns aux projets de loi. L'APN, dominée par le FLN, n'a toujours été qu'une chambre d'enregistrement des projets de loi proposés par le gouvernement. Les cycles de boycott ou de protestation de l'opposition ne changent rien à la donne, puisque la majorité parvient toujours à s'imposer par la logique arithmétique pour entériner aisément les initiatives de l'Exécutif. L'adoption, jeudi dernier, de pas moins de trois textes de loi, dont l'un concerne le secteur sensible de la justice et l'autre engage la politique économique de tout le pays dans un contexte alarmant de baisse de recettes pétrolières, réduit une fois de plus le rôle des parlementaires à celui de simples figurants. Les députés de l'Alliance verte, qui se sont exprimés en marge de la session plénière, pensent que la démarche du gouvernement doit cacher certaines mauvaises surprises. Sinon comment expliquer la décision du bureau de l'Assemblée nationale de changer la date de clôture de la session du printemps ? Les vacances des parlementaires avaient été avancées au 7 juillet alors qu'elles ne devaient commencer que le 2 août. Aucune explication n'a accompagné cette mise en congé prématurée. La session de printemps, ainsi écourtée de presque un mois, donne au président de la République la possibilité de légiférer par ordonnance conformément à l'article 124 de la Constitution. "Cette décision inacceptable traduit clairement la soumission d'un bureau totalement inféodé au gouvernement, qui obéit à des agendas qui ne sont pas ceux de l'Assemblée", a indiqué un communiqué du groupe parlementaire FFS, à l'époque. En 2014, l'avocat Mustapha Bouchachi a remis son mandat de député, motivant sa démission par le fonctionnement illégal d'une Assemblée totalement soumise, selon lui, au pouvoir exécutif, au point que les parlementaires ne peuvent ni initier des propositions de loi ni interpeller, par le truchement de questions orales ou écrites, les ministres sur certains sujets délicats et encore moins engager des commissions d'enquête parlementaire crédibles. Elu député sur la liste du FFS d'Alger en mai 2012, Mustapha Bouchachi a aussi relevé, durant son court mandat, plusieurs entorses à la loi et de nombreuses irrégularités dans le travail de l'Assemblée nationale dont le refus des ministres de répondre dans les temps réglementaires aux questions des députés et l'immixtion des membres de l'Exécutif dans le travail interne de la Chambre basse à travers leur présence dans les différentes commissions parlementaires lors de l'examen des projets de loi concoctés et soumis par le gouvernement. Il a affirmé que les députés sont cantonnés dans le statut de simples fonctionnaires au service du gouvernement, sans pouvoir jouir réellement de leurs prérogatives de représentants du peuple et défendre ses intérêts moraux et matériels. Ce qui entache davantage la crédibilité d'une APN, déjà largement dénoncée pour ses dépenses faramineuses. N.H.