Le patron du groupe Cevital a déconstruit ce qui s'apparentait à un réquisitoire du ministre de l'Industrie et des Mines contre le plus grand investisseur privé national. Hier, le ministre de l'Industrie et des Mines, Abdesselam Bouchouareb, a fait des déclarations qui, d'emblée, ont fait les choux gras de la presse électronique. Et pour cause, il s'en est pris, sans ménagement, au patron du plus grand groupe industriel privé algérien Cevital, Issad Rebrab, se laissant aller à des accusations si graves que ce dernier, qui était entre deux aéroports, a tenu à réagir sans plus tarder. Ainsi, le président de Cevital, joint par téléphone, oppose un démenti formel aux allégations du ministre, à commencer par la plus "fantaisiste" d'entre toutes : celle relative à la prétendue surfacturation d'équipements devant être importés par le groupe. "C'est faux", a martelé Issad Rebrab, avant d'assener : "Je le défie de venir à un face-à-face télévisé devant les Algériens." Sur le fond, le patron du groupe Cevital a déconstruit ce qui s'apparentait à un réquisitoire du ministre de l'Industrie et des Mines contre le plus grand investisseur privé national. En réponse au ministre qui a laissé entendre que M. Rebrab avait voulu importer et déclarer du matériel usagé au prix d'un neuf, le capitaine d'industrie réfute catégoriquement cette accusation. Il souligne avoir demandé au département de Bouchouareb par courrier, et deux fois plutôt qu'une, "l'autorisation de dédouanement de chaîne de production rénovée". Les deux courriers datent l'un du 2 décembre 2014 (accusé de réception daté du 21 décembre 2014) et l'autre du 17 février 2015, à titre de rappel. "Quand on a l'intention de frauder, on n'a surtout pas à l'écrire !", a ironisé M. Rebrab. "Je n'ai obtenu aucune réponse, ni au premier ni au second courrier", a-t-il encore déploré. Cette absence de réponse du ministère lui a causé un préjudice financier qu'il évalue à près de 80 millions d'euros qu'il aurait pu éviter si le département de M. Bouchoureb avait réagi à temps à ces couriers, d'autant que le personnel du complexe Samha, quelque 600 salariés, est au chômage technique, mais toujours rémunéré, depuis l'incendie qui a ravagé l'usine en juillet 2014, soit depuis 15 mois. Autre conséquence de ce blocage : le groupe est contraint d'importer des produits semi-finis (tambours pour machines à laver) qu'il aurait pu fabriquer à Sétif, a-t-il tenu à souligner encore. "Cela se passe dans un pays où l'on prétend encourager la production nationale", se désole le patron de Cevital. "C'est pour cela que j'ai tenu à dénoncer ce décalage entre le discours du gouvernement et ses actes", a-t-il ajouté. Mais, au-delà de ces préjudices financiers causés à l'investisseur et, par-delà, à l'économie nationale, c'est cette accusation sous-entendue de tentative de transfert illégal de devises qui peine le plus le patron de Cevital. "Si c'était le cas, pourquoi le ministre n'a-t-il pas engagé une procédure devant les tribunaux ?", s'est-il interrogé. Le patron de Cevital a tenu à réagir ainsi à chaud aux déclarations du ministre de l'Industrie et des Mines faites à l'occasion de sa conférence de presse conjointe avec son homologue tunisien en visite à Alger. Durant cette conférence, M. Bouchouareb a soutenu n'avoir jamais reçu de demande d'audience émanant d'Issad Rebrab qui, auparavant, avait dénoncé les blocages de ses projets d'investissement, d'autant, avait-il insisté, que Cevital restait un "patrimoine national" qui, propriété des Algériens, n'est pas à vendre. S. A. I.