La fête de thafsouth, célébrée du 3 au 5 mars dernier, est un legs immatériel plurimillénaire perpétué de génération en génération à travers les Aurès. Les associations qui se sont toujours souciées de la sauvegarde, la protection et la promotion de ce patrimoine n'ont pas toujours réussi dans leur noble mission, mais elles ont le mérite d'avoir pris conscience bien avant les institutions officielles de l'importance de ce patrimoine. Cette tradition ancestrale est surtout célébrée dans les zones les plus récluses du pays, comme cela est le cas dans le village de Menaâ (grand Aurès). Tahfsouth (thifsouine au pluriel ) est une manifestation qui coïncide avec la fin de l'hiver et le retour de la belle saison selon le calendrier berbère (calendrier agricole). Dans la région du Menaâ où la pratique de l'agriculture en banquettes (étages) est très répandue, les villageois connaissent bien leur terre, leur pays (thamurth) et ils ont toujours vécu en harmonie avec la nature quand bien même elle est rude et hostile. À Menaâ, les habitants ont des pratiques propres à la région. À titre d'exemple, ils étalent sur les terrasses et balcons les tapis qu'ils ont tissés durant l'hiver. Ces tapis sont souvent bariolés aux couleurs chaudes, rouge, rose, bleu... Aussi des mets sont préparés spécialement pour cette fête, et durant 3 jours les habitants de la dechra échangent toutes sortes d'aliments mais aussi de gâteaux. Dans l'esprit du partage et de la solidarité, les voyageurs, de passage au village, sont systématiquement invités à partager le dîner avec les Menaâouis. Des jeunes peu expérimentés font ce qu'ils peuvent pour que le rendez-vous soit maintenu, mais est-ce le plus important ? Selon des visiteurs et des habitués de la fête, cette coutume qu'ils aiment tant montre des signes de fatigue. Si les jeux traditionnels sont maintenus et dans leur totalité à l'exemple du jeu traditionnel hakourth, ainsi que les chants et danses de troupes traditionnelles... Cependant l'organisation semble être le point faible de cette rencontre, selon de nombreux visiteurs et même des habitants du village. En effet des familles entières ont fait le déplacement à Menaâ en fin de semaine, mais il y avait une défaillance au niveau de l'accueil, de l'orientation et de l'information. Un autre souci semble inquiéter les militants du mouvement associatif à Menaâ qui considère que ce rendez-vous doit être un moyen et un levier pour mettre en exergue la protection du patrimoine et en premier lieu la protection de l'ancienne dechra, qui se détériore sous le regard indifférent des autorités concernées. RACHID HAMATOU