La situation de l'enfant en Algérie est encore "dramatique". La sonnette d'alarme a été tirée, hier, la veille de la célébration de la Journée internationale de l'enfance, par le président du réseau algérien pour la défense des droits de l'enfant Nada, Abderrahmane Arar. "L'Algérie compte annuellement 11 000 à 13 000 enfants présentés devant le parquet pour des raisons liées notamment à la drogue et à l'arme blanche", a-t-il déclaré, lors d'une conférence-débat organisée au Forum d'El Moudjahid. Il a également évoqué les "500 000 enfants non scolarisés", pour la plupart des filles, en justifiant cela par la fréquence des "conflits familiaux" et de "la non-inscription à l'état civil des enfants nés hors mariage ou de mariages à la Fatiha". Par ailleurs, il est revenu sur les 15 enfants kidnappés, en prévenant sur l'importance du nombre de tentatives d'enlèvement d'enfants : plus de 220 chaque année. "Si nous ne réglons pas le problème de la délinquance et de la violence, on ne règlera pas celui des kidnappings", a-t-il relevé. Passant en revue les recommandations du Comité international des droits de l'enfant (Cide) à l'horizon 2012, M. Arar a applaudi la ratification de la Convention internationale des droits de l'enfant, ainsi que la prise de décisions et la mise en place de bon nombre de mesures/mécanismes, par notre pays, non sans les qualifier d'"insuffisantes". Dans ce cadre, il a cité l'adoption, en 2015, du code de protection de l'enfant qui, selon lui, enregistre un retard en matière d'application sur le terrain. Le responsable du réseau Nada a, en outre, parlé du Plan national d'action (PNA) en faveur des enfants, mis en œuvre pour la période 2008- 2015, avant de réclamer "une évaluation" dudit plan, ainsi que la mise en place, dans les meilleurs délais, d'un "nouveau" plan national pour la période de 2016 à 2021. Parmi les autres recommandations, l'intervenant a fait part des "mesures spécifiques" pour les enfants nés hors mariage, dont le nombre est "énorme", notant que le problème posé est celui de la filiation. "Il faut un débat avec les autorités et les acteurs concernés", a-t-il dit, en rappelant que "ce débat est recommandé par le Cide". Sur ce chapitre, ce dernier a aussi observé "l'absence" de mécanisme de suivi des enfants abandonnés ayant fait l'objet d'une kafala, dans les cas de fugue, de maltraitance ou de divorce des parents adoptifs. Plus loin, l'invité du forum a alerté sur les faiblesses de la prévention et sur "la situation effrayante en matière d'agressions sexuelles sur les enfants", signalant les cas d'incestes, à l'exemple de ce père ayant violé sa fille, qui vit "au noir" avec une femme et qui, en parallèle, entretient une autre relation avec une femme avec laquelle il a eu 2 enfants, devenus "SDF". "La parole de l'enfant doit peser dans la procédure judiciaire, et même s'il ment, il faut l'écouter, et c'est à l'institution judiciaire de le prouver", a soutenu M. Arar. D'autres cas ont été mentionnés, comme celui de ces parents divorcés qui ne cherchent pas après leurs enfants, pendant de longues années ; des cas qui témoigneraient du "grand travail qui reste à faire". "Nous ne pouvons plus rester dans le bricolage", a déclaré le conférencier, en plaidant, notamment, pour la mise en œuvre de "la stratégie nationale pour la petite enfance", avant d'ajouter : "Le plus grand défi de l'Algérie est de mettre fin à cette violence." Hafida Ameyar