Le Premier ministre préconise une démarche graduelle en trois volets : la recherche d'une solution amiable chaque fois que cela est possible ; le recours aux tribunaux administratifs territorialement compétents et, "exceptionnellement", l'utilisation de la clause compromissoire, après accord du ministère concerné. Dans une instruction signée par le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, et relative aux litiges contractuels avec les partenaires étrangers, dont Liberté détient une copie, il est demandé aux membres du gouvernement d'instruire les maîtres d'ouvrage sous leur tutelle d'observer "plus de rigueur" dans la gestion des litiges nés de l'exécution des marchés publics, notamment ceux conclus avec des partenaires étrangers, en adoptant impérativement une démarche en trois volets : "rechercher une solution amiable chaque fois que cela est possible ; à défaut, soumettre le litige aux tribunaux administratifs territorialement compétents. Et, ‘exceptionnellement', la clause compromissoire peut être autorisée, après accord du ministère concerné auprès du comité ICC Algérie, tout en privilégiant, quand cela est possible, la conciliation". Il y a été par ailleurs indiqué, en annexe à l'instruction, les noms des arbitres et conciliateurs désignés par l'Etat algérien pour figurer sur la liste du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (Cirdi) et qui peuvent être "consultés dans toute procédure d'arbitrage". Sont ainsi désignés au titre d'arbitres MM. Ali Haroun (avocat), Mohamed Chamloul (avocat), Farid Belkacem (avocat et enseignant de droit), El-Oualid Laggoun (professeur agrégé de droit), tandis que les conciliateurs sont Mohamed-Ameziane Baïlech (avocat), Ahcène Bououden (avocat), Hocine Benissad (professeur agrégé et avocat), Belgacem Boudra (professeur de droit). Nasreddine Lezzar, avocat spécialiste du droit international, estime, dans une déclaration, hier à Liberté, qu'il y a, dans cette note du Premier ministre, "un aspect positif", quand il souligne l'importance de l'arbitrage en insistant sur le fait qu'il soit un domaine spécialisé et pointu. Mais, ajoute-t-il cependant, l'instruction de Sellal véhicule l'idée "totalement erronée, selon laquelle dans toute l'Algérie, seuls quatre cabinets sont éligibles aux conseils et à l'assistance en matière d'arbitrage". "Restreindre, poursuit-il, les compétences nationales dans ce domaine moderne du droit à quatre personnes donne une image pas très reluisante d'un pays où il existe des juristes mondialement connus". "L'établissement de cette short-list de dévolutaires exclusifs de tous les dossiers d'arbitrage, tant en matière de conseil que dans la prise en charge de dossiers d'arbitrage, est complètement anti-déontologique", déplore Nasreddine Lezzar. Et, d'expliquer : "Les cabinets short listés ne manquent sans doute pas de mérite, mais il y en a d'autres qui les égalent en performance." Cette note, dit-il, écorche l'éthique professionnelle des avocats, basée, notamment, sur la saine et loyale concurrence entre avocats. Me Lezzar analyse par ailleurs finement le recours à l'arbitrage international et les coûts qui en découlent. Il rapporte ainsi qu'une étude de la CCI a établi que dans le coût global d'un litige, la plus grande part ne revient pas à l'institution arbitrale et aux arbitres mais aux avocats des parties et aussi aux experts désignés par les parties ou par le tribunal arbitral. On réduirait ainsi les coûts des avocats et conseils en impliquant davantage les juristes de l'entreprise dans la préparation de la défense. Youcef Salami