Le Kirghizstan semble vouloir emprunter le chemin de l'Ukraine pour se débarrasser de ses dirigeants, pour le moins, autoritaires. Les violentes altercations, en début de semaine dans le sud de ce pays de l'ex-Asie soviétique, entre forces de l'ordre et l'opposition, ont gagné Och et Jalal-Abad, deux grandes villes. Le mouvement de contestation a ainsi gagné une bonne partie de la population, dont la mise en marche s'inspire de la “révolution orange” ukrainienne, laquelle avait copié celle de la Géorgie où les caciques étaient mis à la porte sans effusion de sang. Roza Otounbaïeva, leader du parti d'opposition La Patrie, est sereine : la dynamique, à ses yeux, est enclenchée. Partout dans le pays, le mouvement s'amplifie exigeant, devant les bureaux des autorités, la libération de manifestants arrêtés et le départ du pouvoir. Le président Askar Akaïev, conspué, n'est pratiquement plus en mesure de jouer la carte de la répression, la police risquant de basculer dans le camp des manifestants, selon les scénario de l'Ukraine et de la Géorgie. La vague de contestation qui secoue le Kirghizstan, depuis les législatives de février-mars, s'est amplifiée ces derniers jours, alors que l'opposition, qui accuse le pouvoir d'avoir falsifié le scrutin, a prévenu que du sud elle allait monter vers le nord et rejoindre la capitale Bichkek. Outre Jalal-Abad, quatre autres districts sont sous le contrôle du peuple, a assuré La Patrie. L'opposition s'était vue créditer de six des 75 sièges que compte le Parlement, et l'Osce a estimé que les législatives n'avaient pas été conformes aux normes démocratiques. Le pouvoir, affirme l'opposition, a manipulé le vote pour garantir un Parlement loyal au président kirghize, en prévision de la présidentielle prévue en octobre et à laquelle Askar Akaïev a promis de ne pas participer. Ce dernier a mis en garde l'opposition contre la tentation de provoquer un scénario révolutionnaire à l'ukrainienne, estimant que le pays pourrait basculer dans la guerre civile, menaçant de prolonger son mandat. L'opposition, composée principalement de retraités, d'étudiants et de montagnards, a gagné en force ces derniers jours, mais elle reste fragile. Le Kirghizstan est le pays le plus pauvre dans cette Asie musulmane. Contrairement à ses voisins assis sur des nappes de pétroles et de gaz. Le produit national brut par tête d'habitant est de 260 dollars ! L'économie vivrière est complétée par des échanges avec la Chine, son voisin. L'intérêt stratégique de ce pays réside dans sa situation géographique, au cœur de l'Asie musulmane et aux portes de la Chine. La chute du régime de Akaïev serait une catastrophe pour le président russe Poutine. D. B.