Le président du parti Talaie El-Houriat (Avant-garde des libertés), Ali Benflis, a déclaré, hier, lors de son meeting populaire animé à Béjaïa, que "l'Algérie se retrouve dans une impasse politique totale face à une crise économique grave et face à une crise sociale aux conséquences difficilement prévisibles". Intervenant devant une assistance nombreuse, composée essentiellement de cadres et de militants de son parti venus des quatre coins de la région, mais aussi de Tizi Ouzou, de Bouira, d'Alger, de Sétif et même de Ghardaïa, M. Benflis a dressé un tableau peu reluisant de la situation générale du pays. Ce dernier, déplore-t-il, fait face à une crise multidimensionnelle "après quatre mandats successifs voulus par le régime politique en place et après avoir disposé de 10 ans de ressources financières plus de trois fois supérieures à celles accumulées depuis l'indépendance". Selon lui, notre pays a connu dans son passé des crises politiques, économiques ou sociales, mais n'a jamais été confronté à une concomitance de toutes ces crises comme il l'est aujourd'hui. "C'est la concomitance de ces crises qui fait l'exceptionnelle gravité de la situation actuelle dans la mesure où chaque crise amplifie les autres et où les effets de chaque crise s'ajoutent à ceux des autres", a-t-il averti. Rappelant "certaines évidences" afin de faire le bilan d'un parcours, l'orateur estimera que "par temps ordinaire comme par temps de tourmente, notre pays attend de ses gouvernants une gouvernance effective, performante, visible, audible et compréhensible. Mais la réalité affligeante est que par ces temps de grande crise, on ne voit qu'un Etat affaibli et rendu vulnérable par l'impasse politique totale dont nous sommes témoins. On ne voit que des institutions en déficit de crédibilité et de confiance et des gouvernants dans l'incapacité d'indiquer au pays un chemin et de l'éclairer par un projet porteur d'espoir et des aspirations du peuple algérien". Poursuivant son réquisitoire contre les tenants du pouvoir, le leader de Talaie El-Houriat a battu en brèche les discours démagogiques de Bouteflika et ses différentes promesses "chimériques". "L'on nous avait promis le respect des libertés et des droits, la réhabilitation de la citoyenneté pleine et entière, la démocratie et l'Etat de droit, une économie émergente, une société apaisée, juste, solidaire et fraternelle...", a-t-il rappelé. Et d'enchaîner : "Mais, finalement, la réalité est tout autre : les libertés publiques se rétrécissent davantage, la citoyenneté demeure le privilège d'une minorité écrasante alors que la majorité écrasée en est démunie, c'est toujours le règne du pouvoir personnel de l'ordre autoritaire et de l'Etat de non-droit, l'économie nationale en ruine avec 800 milliards livrés à un gaspillage, à une gabegie et à une prédation, la société algérienne n'a jamais subi autant de chocs comme ceux qu'elle a subis et continue à subir." Avant de préciser : "Le choc de la dévalorisation du travail et de l'effort, le choc de la course à l'argent facile, le choc des égoïsmes, le choc du repli sur soi, le choc de la corruption, le choc du népotisme et celui du régionalisme dans son image la plus archaïque et la plus révoltante." Après avoir développé un discours très élogieux sur le passé historique et civilisationnel de la ville de Béjaïa, le chef de file du parti de l'Avant-garde des libertés a déploré la "démission" des hautes autorités de l'Etat lors des événements ayant secoué la région, au début du mois de janvier passé. "Dans tous les pays du monde, la réaction des autorités politiques aurait été immédiate, décisive et à la mesure de la gravité de la situation. Béjaïa, qui était victime d'une vague de violence, est restée seule, livrée à elle-même", s'est-il indigné. Par ailleurs, il a tenu à condamner l'interdiction, par les autorités locales, d'une conférence-débat organisée, la semaine écoulée, par le café littéraire de la ville d'Aokas. Aussi, il a dénoncé les multiples restrictions des libertés syndicales et d'expression, ainsi que les violentes répressions que subissent systématiquement les syndicalistes autonomes, les étudiants, les enseignants et les travailleurs. Pour M. Benflis, le régime politique en place est dans le déni des réalités, faisant dans la diversion et dans la fuite en avant. Enfin, il est à noter que le président de Talaie El-Houriat a bizarrement zappé l'un des sujets d'actualité politique de l'heure, à savoir les prochaines élections législatives que son parti a, d'ailleurs, boycottées. KAMAL OUHNIA