Résumé : Linda veut engager Youcef comme homme à tout faire. En attendant, elle lui demande de déballer les provisions et de réchauffer le déjeuner. Une fois la table dressée, le jeune homme voulut quitter les lieux, mais elle le retint. Youcef hésite. - Je n'aimerais pas vous mettre dans l'embarras, madame. Un simple sandwich m'aurait suffi. - Prends une assiette et sers-toi. Les sandwichs ne constituent pas un repas équilibré, et comme tu dois bientôt travailler pour moi, il va falloir prendre des forces. - Je suis prêt à travailler pour vous dès cette minute, si vous n'y voyez pas d'inconvénient. Elle secoue la tête. - Mon mari ne rentrera que ce soir. D'ici là, tu dois prendre ton mal en patience. Je vais faire en sorte qu'il accepte que tu habites dans la remise et que tu travailles chez nous à plein temps. - Parfait, madame, et merci d'aider un pauvre bougre comme moi. - Allez, Youcef, termine de manger et va te reposer un peu. Maintenant que j'ai cette béquille, je pense que je ne vais pas avoir trop de mal pour me déplacer et subvenir à mes besoins. - D'accord, madame. Mais promettez-moi de me faire appel au cas où cela s'avérerait nécessaire. - Comptez sur moi, Youcef. Le jeune homme quitte les lieux et traverse la rue pour se remettre sur son banc. Avec sa tenue et son journal à la main, on le prendrait facilement pour un travailleur qui faisait une pause vers la mi-journée. Linda, qui l'épiait à travers la fenêtre, ne savait plus qu'en penser. Ne lui avait-il pas dit que la camisole de force qu'il arborait la veille cachait toute une histoire ? La jeune femme se rallonge sur le divan et finit par s'endormir. Lorsqu'elle se réveille, la nuit était déjà tombée. Elle jette un coup d'œil à la pendule. 19h30. Salah n'était pas rentré. Va-t-il passer encore la nuit ailleurs ? Elle ne saurait le dire. Son mari était tellement imprévisible. Elle prend sa béquille et réussit à se traîner jusqu'à la fenêtre. Youcef était toujours là. Il avait encore cet air inquiet qui ne trompait pas. La sonnerie du téléphone retentit. La jeune femme clopine jusqu'à l'appareil et décroche. - Salut ma chérie, tu ne t'ennuies pas trop ? Linda lève les yeux au ciel. Son cher mari s'inquiétait donc pour elle ! - Non. Je... Elle allait lui raconter son accident du matin puis se ravisa. À quoi cela servira-t-il ? - Je ne m'ennuies pas tellement. Quand comptes-tu rentrer, Salah ? Il ne répond pas tout de suite et elle comprend qu'il cherchait ses mots. Des mots assez éloquents pour lui dire qu'il avait encore du boulot et qu'il risquait de tarder ou de ne pas rentrer du tout. Il se racle la gorge et elle l'entendit toussoter avant de répondre. - Ma chérie, je t'appelle justement pour ne pas t'inquiéter. Je ne pourrais pas rentrer ce soir. Un empêchement de dernière minute. Je n'ai pas fini ma mission. Nous avons entamé un projet à long terme, mon équipe et moi, et nous devons encore travailler dessus une journée ou deux. Mais ne t'en fais pas, je te donnerai de mes nouvelles. Linda prend une lente inspiration. Elle ne connaissait que trop son mari et ses sales habitudes. En vérité, elle savait qu'il n'allait pas montrer le bout du nez de sitôt, mais, comme à chaque fois, elle avait espéré qu'il allait enfin revenir à de meilleurs sentiments envers elle et rentrer pour lui dire qu'il regrettait tout le mal qu'il lui avait fait. Une illusion ! - Linda ! Tu es là ? Elle soupire et ferme les yeux avant de répondre : - Oui, Salah, je suis là. - Allons ma chérie. Je suis sûr que tu comprends mieux que quiconque mes préoccupations. Je suis un homme d'affaires. Mais cela ne veut pas dire que je m'éloigne de mes obligations conjugales. La preuve est là. Je t'appelle toujours pour te prévenir de mes absences. - Oui. Tu m'appelles toujours, Salah. Mais tu t'absentes aussi trop souvent ces derniers temps. Je me retrouve seule dans cette grande maison, et je me demande souvent si je ne ferais pas mieux de quitter les lieux. (À suivre) Y. H.