Les matières premières utilisées par la filière se retrouvent listées parmi les produits soumis à la suspension temporaire à l'importation, ce qui risque de porter un coup fatal à toute la branche. La filière boissons en Algérie vit une situation des plus critiques. Et pour cause, la branche subit, depuis le début de l'année, une contrainte qui met en danger la viabilité de son outil de production. Ce qui a poussé l'Association des producteurs algériens de boissons (Apab) a tenir un point de presse, hier, au siège de l'association à Dély Ibrahim. Selon son président, Ali Hamani, le fait que des matières premières de production de l'industrie des boissons se retrouvent listées parmi les produits soumis à la suspension temporaire à l'importation porte un coup à toute la filière. D'autant qu'il est indéniable qu'elle ne bénéficie, à court terme, d'aucune équivalence locale, ni en qualité ni en quantité. M. Hamani a dénoncé, à l'occasion, le fait que l'Apab n'a pas été consultée avant que la liste ne soit dressée. Il a affirmé que l'Apab soutient la démarche du gouvernement consistant à réduire le déficit de la balance commerciale, mais soutient également l'appel du président de la République au dialogue et à la concertation. C'est ce qui fait défaut, selon lui. Dès l'annonce de la publication d'une liste de produits qui seront suspendus à l'importation, l'Apab a transmis diverses correspondances au ministère du Commerce dans lesquelles elle a souligné la nécessité de préserver les unités de production en maintenant leur approvisionnement régulier en matières de production lorsque celles-ci ne sont pas disponibles localement. Par ailleurs, sur recommandation de la Commission intersectorielle chargée du suivi et de l'évaluation des mesures de sauvegarde, l'Apab s'est réunie, en date du19 février dernier, avec le Consortium des fabricants d'arômes. Il en est ressorti, de l'aveu des producteurs algériens d'arômes, que ces derniers n'étaient pas en mesure, dans l'immédiat, de fournir l'industrie compte tenu de ses besoins complexes et variés en arômes. Toutes ces données ont été communiquées à la Commission intersectorielle comme au ministère du Commerce, mais au grand dam de l'Apab, aucune réaction n'est parvenue et aucune mesure n'a été prise, a déploré Ali Hamani. Au jour d'aujourd'hui et en l'absence de signaux de la part des pouvoirs publics, l'inquiétude s'empare des producteurs. D'ailleurs, selon le président de l'Apab, des chaînes de production ont commencé à être arrêtées. Et si la situation perdure, il y aura de probables fermetures d'unités de production dans un ou deux mois avec la perspective de licenciements que risquent de connaître des centaines de travailleurs, a ajouté Ali Hamani, qui dit ne pas comprendre cette attitude et ce silence. Pour sa part, Slim Othmani, président du conseil d'administration de NCA Rouiba, a estimé que la bataille que les producteurs mènent est "ridicule", se demandant comment développer la production nationale lorsque très peu d'intrants sont fabriqués localement. Il a ajouté que même les aromaticiens importent des arômes pour fabriquer leurs propres arômes. Selon lui, les producteurs ne doivent pas subir des restrictions à l'importation ni en droits de douane pour être compétitifs. Slim Othmani a déploré que depuis trente ans, les aromaticiens n'ont fait aucun effort pour s'élever aux standards internationaux. Si, aujourd'hui, on essaye de favoriser les secteurs des arômes en interdisant l'importation, il serait utile de s'interroger sur sa contribution à l'économie nationale en comparaison avec le secteur des boissons, a souligné Ali Hamani. Il y a également un investissement sur la fabrication des canettes de boisson qui, depuis quatre années, est bloqué. En conclusion, les membres de l'Apab estiment qu'en cette période de préparation des besoins du marché pour le mois de Ramadhan et pour la saison estivale, la situation devient très tendue et met en péril la pérennité de la filière. Saïd Smati