Le taux de création des microentreprises a baissé de près de 80% depuis 2015. C'est ce que nous a révélé, hier, une source proche de l'Agence nationale de soutien à l'emploi de jeunes (Ansej), à Constantine. "Le nombre de demandeurs auprès de l'Ansej a connu une régression très importante dans toutes les wilayas du pays", précise encore notre source. Et d'ajouter qu'à Constantine, le nombre de microentreprises a baissé de plus de 32% en 2017, par rapport à l'année 2016. En effet, les jeunes ne font plus confiance à l'Ansej, selon notre interlocuteur. Un dispositif qui, rappelons-le, a été mis en place en 1996 dans l'objectif d'aider les jeunes à créer leur propre entreprise, d'une part, et de faire face au chômage, d'autre part. Aujourd'hui, à plus forte raison, puisque "8 600 chefs de microentreprises créées par le biais de l'Ansej sont poursuivis en justice", ajoute notre source. Des experts en économie, qui ont requis l'anonymat, reprochent, en effet, aux responsables de ce dispositif "la mauvaise gestion". "Il manque l'étude d'intégration des projets dans le tissu économique, un délai étudié du remboursement et du lancement du projet, sans oublier des accompagnateurs non qualifiés", nous affirme un professionnel du secteur. Et de poursuivre : "Pour toutes ces raisons, on se retrouve devant des projets qui manquent de maturation." Il explique : "Les accompagnateurs des jeunes porteurs de projets ne sont pas formés pour encadrer et ils n'ont pas l'expérience nécessaire pour ce genre d'encadrement. C'est juste une procédure administrative en l'absence d'une étude des risques de faillite qui doit être prévisible pour tout projet." Pour notre interlocuteur, le nombre de poursuites judiciaires enregistrées jusqu'au mois de janvier dernier (plus de 8 000 dossiers) est une preuve de la défaillance enregistrée dans l'application du dispositif de l'Ansej. Contactés hier, quelques bénéficiaires du dispositif nous ont affirmé qu'ils se sont, pour ainsi dire, retrouvés "coincés". "J'ai bénéficié d'un financement d'un projet pour la création d'une microentreprise spécialisée en informatique, mais le projet n'est pas rentable et je me retrouve avec des dettes", déplore Amine, 30 ans. "Le lieu a été mal choisi, et le représentant de l'Ansej m'orientait juste par téléphone, je ne l'ai rencontré qu'une fois durant la réalisation de mon projet", explique-t-il, tout en regrettant le fait qu'il se retrouve à la case départ après 5 ans du lancement de son projet, en plus des mises en demeure envoyées par la banque. Pour élever le taux des projets, les responsables locaux de l'Ansej ciblent les diplômés universitaires. Ces derniers vont se retrouver dans la même situation, avec des projets non rentables et des dettes, puisque la gestion de ces projets et l'encadrement de leurs porteurs demeurent toujours les mêmes, selon des sources proches de ce dossier. Ces derniers nous ont, en effet, révélé que le taux des projets financés par l'antenne de l'Ansej à Constantine, destinés aux universitaires, ne dépassent pas les 11%. Par ailleurs, 70% des microentreprises financées par l'Ansej entre 2011 et 2016 sont "inexistantes" sur le terrain. "Les bénéficiaires ont quitté le pays sans rembourser les prêts", nous affirme notre source. Notons que les responsables de l'antenne de wilaya de l'agence ont refusé, hier, de nous communiquer les chiffres. "Nous avons reçu des instructions de la tutelle pour ne communiquer aucune statistique relative à nos activités à la presse", nous a déclaré la chargé de communication de l'Ansej à Constantine. Souheila B.