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"Il est temps que cette affaire connaisse son épilogue" Ali Mebroukine, professeur en Droit des affaires, s'exprime sur le blocage du projet de Cevital
Ali Mebroukine estime que "le P-DG de Serport doit agir dans le cadre de ses fonctions qui sont strictement et limitativement définies par le texte portant création de Serport. Il ne dispose pas d'un pouvoir discrétionnaire pour autoriser ou empêcher des opérations commerciales utilisant les infrastructures portuaires du pays. L'ensemble des décisions qu'il a prises sont entachées d'illégalité". Dans l'affaire du blocage de l'usine de Cevital prévue à Béjaïa, les juristes voient une flagrante entorse aux lois de la République, voire une violation des droits en matière d'investissement et de commerce, pourtant garantis et écrits au crayon-feutre dans la Constitution. Quant aux conséquences de cette affaire sur l'image de marque d'un pays en quête de visibilité à l'international, elles seraient déjà lourdes et avérées. Les chancelleries étrangères s'y intéressent. Les institutions de Bretton Woods et les agences de notation aussi. Celles-ci "perçoivent très négativement les tribulations de Cevital", souligne Ali Mebroukine, professeur en droit des affaires, contacté par Liberté. Il admet, néanmoins, que "contrairement à ce que pense une partie des observateurs, ces institutions ne les mettent pas sur le compte d'une volonté délibérée des autorités de l'Etat d'empêcher l'investissement, créateur d'emplois et de richesses, surtout face à la montée du chômage". Cela voudrait-il dire qu'un pouvoir parallèle se serait emparé des commandes ? En tout cas, le silence des responsables officiels face à ce qui s'assimile à un "exercice illégal de l'autorité" en dit long. Certains comportements hostiles à l'investissement de Cevital sont, en tout cas, en flagrante contradiction avec certains articles de la loi fondamentale qui, dans son article 43, à titre d'exemple, garantit "la liberté d'investissement et de commerce". Elle enjoint l'Etat d'"œuvrer à améliorer le climat des affaires" et à "encourager, sans discrimination, l'épanouissement des entreprises au service du développement économique national". Pour ne citer que cet article de la Constitution, le contraste est, pour le moins, énorme avec les agissements du P-DG de Serport qui outrepasse largement ses prérogatives dans l'exercice de son autorité aux fins de bloquer le groupe Cevital. "La tentation d'invoquer la lettre de la Constitution, qui garantit la liberté d'investissement au service du développement économique national, est naturellement irrésistible", estime Ali Mebroukine. Selon lui, le gouvernement "a l'obligation d'accompagner tous les projets favorisant la croissance et la création d'emplois". "Il s'y est engagé à travers l'ensemble des textes législatifs et réglementaires pris depuis 20 ans, ainsi que dans les conventions internationales bilatérales qu'il a conclues avec les autres Etats", précise-t-il. Or, le gouvernement s'est complètement détourné de cette affaire de blocage dont souffre l'investissement de Cevital pour déplacer son attention sur le terrain politique. Cette motion de blocage exercée par des cercles occultes ne semble pas l'inquiéter. Encore moins ses conséquences sur l'image du pays. Profitant de cette passivité criante, le P-DG de Serport règne en maître sur des terrains qui ne sont pas les siens. Professeur en droit des affaires, Ali Mebroukine pense que "le P-DG de Serport doit agir dans le cadre de ses fonctions qui sont strictement et limitativement définies par le texte portant création de Serport. Il ne dispose pas d'un pouvoir discrétionnaire pour autoriser ou empêcher des opérations commerciales utilisant les infrastructures portuaires du pays. L'ensemble des décisions qu'il a prises sont entachées d'illégalité". Le FMI donnait déjà l'alerte Par-dessus tout, "il n'est pas une autorité administrative ; c'est au ministre des Transports et des Travaux publics d'assumer la décision de blocage. Si le ministre prend un acte réglementaire, sous forme d'arrêté, le Conseil d'Etat pourrait l'annuler s'il est contraire à la loi, sur le fondement de l'article 901 du Code de procédure civile et administrative", fait constater notre interlocuteur qui n'hésite pas à faire parler la loi pour dire toute l'illégalité dans laquelle agit le P-DG de Serport. Mais d'où puise-t-il cette force pour s'acharner aussi obstinément contre Cevital ? Ne se contentant pas de bloquer cet investisseur à Béjaïa, Djelloul Achour a adressé une instruction à tous les ports du pays, dans laquelle, il demandait de refuser le débarquement de conteneurs contenant le matériel industriel de Cevital destiné à son projet d'usine de trituration de graines oléagineuses à Béjaïa. Peu avant cet épisode, le P-DG de Serport a demandé au port de Skikda de se faire assister par les services de police et des douanes pour saisir le matériel de Cevital. "Ce projet souffre de l'absence d'autorisation", a-t-il indiqué dans une déclaration faite au site Alg24, reprise par TSA, précisant que le matériel saisi à Skikda "n'a pas été dédouané". Documents à l'appui, le groupe Cevital a démenti catégoriquement les allégations de Djelloul Achour, affirmant que "les équipements repris par le port de Skikda ont bel et bien été dédouanés le 8 juillet 2018, comme le prouvent les documents que nous mettons à votre disposition, à savoir le document D10, tamponné par les douanes, le bon à enlever, qui autorise la sortie des équipements du port après dédouanement et la quittance de paiement des droits de timbre, les équipements ayant été importés en franchise de droits de douane car le projet de Cevital bénéficie des dispositions de l'Andi. Le port de Skikda a repris ces équipements le 17 juillet, soit 9 jours après leur dédouanement". De l'avis d'Ali Mebroukine, "il est indispensable que cette affaire connaisse son épilogue". "S'il existe des éléments à charge contre Cevital, qu'on les fournisse ; dans le cas contraire, il faudra le laisser travailler", pense-t-il. Au-delà de son caractère suspicieux, relevé d'ailleurs par les juristes, cette affaire, dans le fond comme dans la forme, relève d'un cas de violation, on ne peut plus clair, des droits et des lois de la République. Jamais les affaires économiques du pays n'ont été gérées avec une aussi grave légèreté. L'on ne se soucie même plus du reflet que peuvent susciter de telles affaires à l'international. Dans son dernier rapport sur l'Algérie, diffusé le 16 juillet dernier, le Fonds monétaire international (FMI) a indiqué que "des enquêtes internationales montrent que les formalités administratives et la corruption figurent parmi les principales entraves à l'activité du secteur privé". L'institution de Bretton Woods ne fait que sonner le tocsin quant à un climat d'investissement irrespirable. Ali Titouche