Depuis quelques semaines, des représentants de corps de métiers, qui requerraient le visa Schengen, des services consulaires français notamment, comme une simple formalité, essuient successivement des refus aux motifs quelque peu déconcertants, comme "l'intention de quitter le sol Schengen n'est pas établie", "compte bancaire insuffisant" ou "dossier incomplet". La récurrence des réponses négatives est édifiante. M. est un avocat inscrit au barreau de Blida. Il est propriétaire d'un appartement à Paris. Depuis bientôt vingt ans, il n'a jamais eu de problème pour renouveler son visa de circulation pour une durée de validité relativement longue. Une année, les premiers temps, puis deux ans, et depuis 2008, deux fois cinq ans. Il a déposé son dossier de renouvellement en juillet dernier. Il a été étonné de récupérer son dossier, au bout de deux semaines, avec la mention : demande refusée. Des médecins, rencontrés samedi au séminaire sur les lymphomes, ont attesté subir le même sort, ces derniers temps. Des journalistes et des chefs d'entreprise aussi… Les plus chanceux s'en sortent avec des visas valides pendant trois à six mois, parfois avec une entrée unique (les consulats d'Espagne, d'Italie et d'Allemagne réduisent également considérablement la durée de validité). Tous affirment justifier de nombreux visas antérieurs, dont les conditions d'utilisation (droit de rester dans un pays européen 90 jours tous les six mois) et délais d'expiration ont été scrupuleusement respectés. Phénomène curieux, dès lors que ces catégories de demandeurs se prévalaient, jusqu'à une date récente, du privilège du corps, car ils voyagent souvent pour motifs professionnels. Leurs missions à l'étranger sont prises en charge financièrement par l'employeur ou par l'organisme qui les invite. Le détail est important car l'ambassadeur de France en Algérie, Xavier Driencourt, a expliqué, en juillet 2017, que "le fait de disposer de ressources suffisantes pour couvrir les frais du séjour et d'un hébergement en France sont des conditions qui font partie des instructions du code des visas Schengen, et qui sont déterminantes dans la décision de délivrer un visa". Autrement, une récente résolution de l'Union européenne impose des restrictions sur le visa Schengen à "tous les pays pourvoyeurs de migrants, y compris les pays transitaires, et qui n'acceptent pas les personnes expulsées à partir des pays de l'UE et membres de l'espace Schengen". Sauf qu'il ne convient pas d'assimiler tous les Algériens demandeurs de visa à de potentiels candidats à l'émigration clandestine. Une majorité voyage pour le travail, des vacances ou des visites familiales. Le passeport algérien est parmi les plus faibles au monde en considérant qu'il est admis dans de très rares frontières sans visa. Il est stigmatisé davantage dans le sillage de la politique européenne de lutte contre le flux migratoire incontrôlé. Un groupe de pharmaciens n'a pu participer, au mois d'août écoulé, à un congrès médical en France, à défaut de visa. Des cadres d'une entreprise privée ont raté une séance de travail avec des partenaires à Paris pour les mêmes raisons. Les exemples foisonnent. Souhila H.