Le ralentissement de la croissance reflète le déficit criant en investissements productifs dont souffrent nombre de filières industrielles, alors que la dépense publique peine à remettre sur les rails les services, le bâtiment et les travaux publics, ainsi que l'agriculture. La décision de réviser à la hausse les budgets d'équipement et d'investissement au titre de l'actuel exercice n'était pas suffisante pour insuffler une dynamique dans le moteur de la croissance. En témoignent les dernières statistiques du Fonds monétaire international (FMI) sur l'évolution de l'économie algérienne. L'institution de Bretton Woods a révisé à la baisse, à 2,5%, sa prévision de croissance pour l'Algérie en 2018 contre 3% anticipé dans son rapport d'avril, maintenant, en revanche, inchangée sa projection pour 2019 à 2,7%, dans ses dernières Perspectives économiques mondiales publiées mardi, à Bali, en Indonésie. Un revers pour l'Exécutif qui avait décidé de casser sa tirelire au titre de l'actuel exercice pour tenter un retour à la croissance, après deux années d'austérité qui a essentiellement touché le budget d'équipement, à raison de 16% en 2016 et de 28% en 2017. Le ralentissement de la croissance reflète le déficit criant en investissements productifs dont souffrent nombre de filières industrielles, alors que la dépense publique peine à remettre sur rails les services, le bâtiment et les travaux publics, ainsi que l'agriculture. Le Fonds n'accorde ainsi aucun satisfecit à l'Exécutif en l'absence de réformes structurelles et ambitieuses susceptibles de faire émerger un autre modèle de croissance. Le trou d'air dont souffre le moteur de croissance, confirmé par le FMI, a détruit des emplois et ferait rebondir à 13,3% le taux de chômage en 2019, contre une prévision de 11,6% pour l'année en cours, lit-on dans les Perspectives économiques du FMI. Il y a eu, en un mot, de l'argent injecté pour peu de résultats, alors que, sur le court et le moyen termes, il y aura peu de moyens budgétaires à mettre au service de l'investissement pour pouvoir espérer un inversement de tendance aussi bien sur la courbe de croissance que sur celle de l'emploi. Pour ainsi dire, la volonté du gouvernement de faire repartir la croissance au moyen de l'investissement budgétaire semble montrer ses limites. Une stratégie qui pourrait s'avérer risquée sur moyen terme faute de moyens budgétaires au-delà de ce que permet la planche à billets comme cash-flow. Des comportements hostiles à l'investissement Du coup, pour le gouvernement qui se bat contre une éventuelle aggravation du coût social de la crise, et qui se traduirait par un net ralentissement de la croissance, une hausse du chômage et le retour des tensions inflationnistes, la tâche est encore immense et n'a de choix que d'envisager les réformes structurelles auxquelles appellent les institutions de Bretton Woods et la Banque d'Algérie. Cette institution est sortie de ses gonds, cette semaine, pour appeler à "un vaste programme de réformes structurelles pour libérer le fort potentiel de croissance de l'économie nationale et diversifier l'offre locale et les exportations de biens et services". Quatre années après l'apparition des premiers signaux du contrechoc pétrolier de 2014, force est de constater que l'Exécutif se fait plutôt distinguer par une parfaite inaction, alors que les risques sur les positions financières, sur la croissance, ainsi que sur le chômage et l'inflation vont en s'amplifiant. L'investissement productif est non seulement la clé de voute des objectifs en matière de diversification et de sortie de crise, mais joue également un rôle stabilisateur aussi bien au plan de l'emploi que sur la courbe de l'inflation. En matière d'investissement, l'Algérie n'a pu encaisser que 1,2 milliard des 42 milliards de dollars de flux d'IDE captés par l'Afrique en 2017. La Conférence des Nations unies pour le commerce et l'investissement (Cnuced) a relevé, dans son dernier rapport, que les IDE captés par l'Algérie en 2017 sont en baisse de 26% par rapport aux 1,63 milliard de dollars enregistrés en 2016. Si la baisse de la valeur des IDE est la conséquence, on ne peut plus claire, d'un climat des affaires peu favorable au business, l'investissement du privé résident fait face, quant à lui, à une montée en puissance des mesures restrictives aux affaires et des comportements bureaucratiques qui inhibent les initiatives. Le blocage auquel fait face le projet d'usine de trituration de graines oléagineuses de Cevital, prévu à Béjaïa et dont il est attendu la création de 1 000 emplois directs, 2000 emplois indirects et plus de 100 000 autres emplois dans le secteur agricole, renvoit l'image d'un pays hostile à l'investissement, immobile et peu rassurant sur les droits des investisseurs. Ali Titouche