Dès le lancement de l'idée de ce "Grand débat national", les "gilets jaunes" et de nombreuses personnalités l'ont qualifiée d'"enfumage" et de "diversion" du gouvernement pour faire oublier aux Français l'essentiel : comment sortir de la crise socioéconomique en France. À peine son contenu dévoilé, la "Lettre aux Français" du président Emmanuel Macron a subi de vives critiques, dans le fond et dans la forme, notamment concernant la question liée à l'immigration, devenue le thème phare des politiques en France ces dernières années. M. Macron a posé une série de 32 questions, dans le cadre de son "Grand débat national", visant à désamorcer la crise des "gilets jaunes" qui secoue la France depuis deux mois, après l'annonce des hausses des prix du carburant. La contestation de cette décision du gouvernement a viré à la crise politique, les manifestants exigeant carrément la démission d'Emmanuel Macron, dont la politique est qualifiée d'antisociale. "Que proposez-vous pour améliorer l'intégration dans notre nation ? En matière d'immigration, une fois nos obligations d'asile remplies, souhaitez-vous que nous puissions nous fixer des objectifs annuels définis par le Parlement ? Que proposez-vous afin de répondre à ce défi qui va durer ?", interroge M. Macron le peuple français dans sa lettre que les partis de l'opposition et les organisations de lutte contre la discrimination raciale ainsi que les "gilets jaunes" rejettent en bloc. Car, pour eux, cette lettre "intègre comme nous le craignions la thématique de l'immigration, en laissant lourdement sous-entendre que nous accueillions trop d'immigrés et que ces derniers et leurs enfants n'étaient pas suffisamment «intégrés». Propos graves et irresponsables qui sonnent comme une diversion nauséabonde", a réagi sur twitter l'association SOS Racisme dans un communiqué. Pour Esther Benbassa, sénatrice Europe-Ecologie-Les Verts (EELV) de Paris, "les «gilets jaunes» attendent des réponses à leurs revendications. Voilà une lettre fleuve qui les remet à plus tard pour gagner du temps. Le peuple demandera, le roi Macron disposera. Il occulte les problèmes importants et introduit immigration, laïcité pour enflammer les esprits", lit-on sur son compte twitter. "Question migratoire et laïcité sont annoncées dans la Lettre aux Français du président comme des sujets du débat pour répondre aux «gilets jaunes». Ce n'est pourtant pas au cœur des préoccupations sur les ronds-points. Rude pour ceux qui ont cru à un Macron rempart du FN", a dénoncé Clémentine Autain, députée La France insoumise (LFI). Mais dans l'entourage du président et de son parti, l'on tente vainement de justifier l'intégration de telles thématique qui, implicitement, stigmatisent les étrangers installés en France, en les rendant responsables de la crise du chômage, dans un contexte marqué par une diminution des chances d'accès à l'emploi et une précarisation des conditions des travailleurs en France. "Il n'y a pas de questions taboues", a tenté de se justifier Jean-Baptiste Djebbari, un député de la République en Marche, le parti au pouvoir. Avec ce débat, Macron fragilise davantage sa position et prend le risque d'aggraver la crise. Lyès Menacer