Des bouteilles sont lancées des balcons aux marcheurs et d'autres initiatives sont venues d'anonymes qui ont distribué gratuitement des drapeaux. Ce troisième vendredi de mobilisation populaire à Oran, avec comme touche particulière la célébration de la Fête de la femme le 8 Mars, a été à nouveau un message fort envoyé au pouvoir et aux tenants du "jusqu'au-boutisme" pour le 5e mandat. Outre la mobilisation de la population qui s'est accrue comparativement aux deux premières marches dans la ville d'Oran, celle d'hier a été aussi celle des tabous cassés. Et pour cause, les femmes sont venues en grand nombre manifester et défiler au milieu de la foule d'hommes et de jeunes. Alors que certaines sont venues en famille, les femmes jeunes et moins jeunes, portant hijab, voile ou tête nue, ont marché et crié à tue-tête. Certaines se sont vu offrir des fleurs lorsque ce n'étaient pas elles qui tendaient une rose. Une dame d'un âge certain, venue avec sa petite-fille, a eu les honneurs des jeunes faisant presque une ronde autour d'elle, et allant même jusqu'à l'embrasser sur le front. Une enseignante venue d'Arzew, Atika, nous dit : "C'est ma troisième marche et on sortira à chaque fois, jusqu'à ce qu'ils respectent la volonté du peuple." Cette volonté, d'ailleurs, n'a pas fléchi d'un pouce, ce vendredi à Oran, avec des slogans habituels, mais de plus en plus politisés comme "Nous voulons la fin du régime", "FLN dégage", et l'incontournable "Le peuple ne veut pas de 5e mandat". Une nouveauté à Oran ce vendredi, un début d'organisation des manifestants, qui, par carrés, ont assuré eux-mêmes un service d'ordre, y compris un cordon de sécurité pour protéger les BRI et brigades anti-émeutes devant la wilaya. Des bouteilles d'eau sont lancées des balcons aux marcheurs et d'autres initiatives sont venues d'anonymes qui ont distribué gratuitement des drapeaux. Les youyous n'ont cessé de fuser des balcons et de la foule des manifestants. Chaque carré avait sa banderole frappée de "Non au 5e mandat", les universitaires, des syndicats autonomes mais sans leur sigle, et qui avaient appelé à manifester "aux côtés du peuple" ont déployé de grandes banderoles sur lesquelles on pouvait lire : "Non au régime militaire, oui à la démocratie", ou encore "Pour une Algérie de justice sociale". Durant toute l'après-midi, une foule indescriptible défilera dans tous les sens, les cortèges se croisant, sur la rue Larbi-Ben M'hidi envahie, alors que d'autres arpentent le front de mer. La place du siège de la wilaya, la place de la radio, la place des Victoires, la place du 1er-Novembre ont été prises d'assaut par des centaines de jeunes et de femmes de tous âges.