La population de Béjaïa refuse de nouveau l'offre de dialogue du pouvoir, tout en dénonçant les personnalités du panel, dont le chef de file de la délégation, Karim Younès, un enfant de la région. "La hiwar, la chiwar, errahil obligatoire" (ni dialogue, ni consultation, le départ du système est obligatoire), telle a été la cinglante réponse des Béjaouis, hier, aux partisans du dialogue avec le pouvoir en place. En effet, les six membres du panel des personnalités ayant pris langue avec le chef de l'Etat par intérim, Abdelkader Bensalah, en vue de mener "un dialogue national inclusif", ont été vigoureusement dénoncés par la rue béjaouie, lors de la marche du 23e vendredi de mobilisation populaire qui s'est déroulée, hier, sous une chaleur caniculaire. C'est dire que la population de Béjaïa rejette de nouveau et de manière formelle l'offre de dialogue du pouvoir incarné par Bensalah, tout en dénonçant les personnalités reçues par ce dernier, dont le chef de file de la délégation, Karim Younès en l'occurrence, un enfant de la région. Qualifiant l'offre politique du chef de l'Etat par intérim d'"une énième manœuvre du pouvoir", visant à "imposer une élection présidentielle jouée d'avance", les manifestants béjaouis réitèrent la principale revendication du mouvement populaire né le 22 février 2019, à savoir le départ définitif et inconditionnel de toutes les figures apparentées au régime de Bouteflika, à commencer par le chef d'état-major de l'ANP, le général Ahmed Gaïd Salah, Abdelkader Bensalah, Noureddine Bedoui et son gouvernement. "L'initiative de dialogue que veut lancer Karim Younès connaîtra le même sort que celle menée par Abdelaziz Rahabi. Toutes les offres politiques émanant du pouvoir en place ou chapeautées par ses représentants sont vouées à l'échec. Le peuple veut du sang neuf. La tenue d'une élection présidentielle dans le contexte actuel et avec le même gouvernement ne constitue nullement la priorité des Algériens", nous a confié un professeur de l'université de Béjaïa qui participe chaque vendredi aux marches populaires organisées dans la ville des Hammadites. Le message des Béjaouis est, à l'instar d'ailleurs de celui de la majorité des Algériens, clair et net : "Pas de négociations avec un pouvoir maffieux", "Non au régime militaire", "Pour une Algérie libre et démocratique". En témoignent les slogans scandés à tue-tête par ces milliers de manifestants qui ont sillonné, encore une fois hier, les principales artères de la ville de Yemma Gouraya. "Ulac acawar" (Pas de dialogue), "Anelhu, anelhu alama yeghli udabu" (Nous continuerons de marcher jusqu'à la chute du régime), "Dawla madania, matchi âaskaria" (Pour un Etat civil et non militaire), "Echaâb la yourid houkm el-âaskar min djadid" (Le peuple ne veut pas d'un régime militaire de nouveau), "Pouvoir assassin", "Système dégage" sont autant de slogans mis en avant par les marcheurs. À noter qu'un carré de manifestants qui a pris la tête de la marche d'hier, à Béjaïa, a déployé une imposante banderole noire, sur laquelle on a écrit ce mot d'ordre : "La désobéissance civile est la seule et unique solution." Il faut signaler que des citoyens bénévoles se sont attelés à distribuer aux manifestants des bouteilles d'eau minérale fraîche tout au long de l'itinéraire de la marche. Un geste de solidarité citoyenne fortement salué par les observateurs de la scène politique locale. KAMAL OUHNIA