Le collectif d'avocats qui devait assurer la défense de ces militants s'est retiré pour dénoncer les chefs d'inculpation portés contre leurs clients et l'instrumentalisation de la justice à travers des procès inéquitables pour condamner des animateurs du mouvement populaire. Le mandat de dépôt se banalise. Plusieurs dizaines de citoyens, dont des militants politiques, des chefs de parti, d'anciens maquisards…, sont mis sous mandat de dépôt. Le tribunal de Sidi M'hamed d'Alger est d'ailleurs devenu expert en la matière. Il ne se passe pas une semaine sans que ce même tribunal décide des mises en détention préventive de manifestants arrêtés lors des actions de rue, pourtant pacifiques. Prévu comme une exception, le mandat de dépôt est devenu la norme. Hier encore, quatre militants du Rassemblement Actions Jeunesse (RAJ) et un autre du Front des forces socialistes (FFS) ont été mis en détention provisoire par le juge d'instruction près le tribunal de Sidi M'hamed. Ils sont accusés d'"atteinte à la sécurité de l'Etat et d'incitation à attroupement". Ces nouveaux pensionnaires du pénitencier d'El-Harrach ont été arrêtés vendredi 4 octobre après la marche du mouvement populaire par des éléments des services de sécurité en civil. Hakim Addad, Djalal Mokrani, Kamel Ould Ouali et Massinissa Aïssous, tous militants du RAJ, ainsi qu'Ahmed Bouider, militant du FFS, viennent allonger la liste des détenus d'opinion mis sous mandat de dépôt depuis le début du soulèvement citoyen contre le système politique en place. Lors de leur audition devant le juge d'instruction, le collectif d'avocats qui devait assurer leur défense s'est retiré pour dénoncer les chefs d'inculpation portés contre ces militants et pour, également, dénoncer l'instrumentalisation de la justice à travers des procès inéquitables pour condamner des animateurs du mouvement populaire. Conduits après leur arrestation à Bab Jdid pour des interrogatoires, les cinq militants ont été transférés, hier, en début d'après-midi, au tribunal de Sidi M'hamed qui a décidé de les mettre sous mandat de dépôt à la prison d'El-Harrach. Hier, dans la matinée, en signe de soutien et de solidarité avec les militants arrêtés et les autres détenus d'opinion, un sit-in a été organisé devant le tribunal de Sidi M'hamed. Les personnes présentes, dont des chefs de parti, tels qu'Ali Laksri, responsable du FFS, Mohcine Belabbas, président du RCD, Mahmoud Rachedi, responsable du PST, Aomar Saoudi et Lila Hadj-Arab, députés du RCD, Youcef Ramdane Tazibt et Nadia Chouitem, cadres du PT, des animateurs du RAJ, des journalistes, des membres des familles des détenus, des animateurs du Comité national pour la libération des détenus (CNLD) et des avocats, ont toutes tenu à se présenter pour dénoncer "une justice aux ordres" dont use "le pouvoir pour faire taire la rue". Aux alentours du tribunal, la police a procédé à plusieurs arrestations parmi les manifestants qui voulaient rejoindre le sit-in. Selon le CNLD qui a lancé une alerte sur sa page facebook, des policiers en civil postés aux abords du tribunal de Sidi M'hamed ont lancé "une opération de chasse à l'homme", surtout des personnes connues du CNLD, du RAJ, du Réseau de lutte contre la répression, et même des parents de détenus. Le CNLD a ajouté, à ce propos, que plusieurs personnes ont été embarquées "déjà pour faire avorter le sit-in de soutien aux militants du RAJ". Le CNLD a signalé l'arrestation de Mourad Amiri, qui s'était rendu au tribunal pour assister à son procès contre le ministère de l'Intérieur. Le procès a été reporté, sur demande de la défense, au 20 octobre prochain. Mourad Amiri a estimé que son arrestation sous prétexte qu'il est militant du RAJ vise plutôt à le condamner "par défaut de présence".