Dans cet entretien express, l'avocat agréé près le barreau de Boumerdès Me Seddik Mouhous estime que le fait de convoquer les procès de l'ensemble des manifestants du hirak placés sous mandat de dépôt exprimerait une volonté de réparer l'injustice de leur incarcération. Liberté : Quelle lecture faites-vous de la décision des juges d'instruction près le tribunal de Sidi M'hamed de convoquer les procès des manifestants placés en détention provisoire ? Me Seddik Mouhous : Le fait que les dossiers de l'ensemble des détenus du hirak soient désormais collectivement renvoyés, même à moins de quatre mois de détention préventive pour certains, en correctionnelle par les juges d'instruction exprime, à mon sens, une volonté de réparer la contradiction de leur incarcération par rapport aux dispositions légales contenues et dans la Constitution et les conventions internationales ratifiées par l'Algérie et dans le code de procédure pénale. Mais aussi pour réparer la justice à deux vitesses entre le tribunal de Sidi M'hamed et les tribunaux du reste des wilayas du pays, où les personnes arrêtées pour les mêmes accusations, à savoir "atteinte à l'intégrité de l'unité nationale", notamment pour port de l'emblème amazigh, ont été quasiment toutes acquittées. Doit-on comprendre par là que les détenus d'Alger seront aussi acquittés ? Je peux dire que je suis très optimiste. Car, si on applique la loi, il ne peut y avoir de décision autre que leur acquittement. Le cadre juridique, dont l'article 59 de la Constitution et l'article 123 du code de procédure pénale, est clair : la détention préventive est une mesure exceptionnelle et qui n'est applicable que pour des faits graves. Ces dispositions sont prises pour protéger les prévenus lorsque les faits sont graves tels que le crime, ou lorsque les prévenus ne présentent pas de garantie pour ne pas fuir la justice. Ce qui est loin d'être le cas des manifestants du hirak. Donc, sauf grande surprise, tous les détenus devraient en principe être acquittés. Dans ce cas, les prévenus pourraient donc faire valoir leur droit citoyen pour réclamer des dommages et intérêts… Effectivement, en cas d'acquittement qui reste le seul jugement valable concernant les détenus du hirak, ces derniers pourraient légalement réclamer réparation. Ils bénéficieraient logiquement d'indemnités auprès du Trésor public pour leur incarcération préventive légalement injustifiée.