Eu égard à la mobilisation populaire, les candidats dont les dossiers seront validés seront confrontés à une difficulté de taille : comment pouvoir faire campagne dans un environnement politique hostile ? C'est sans grande surprise que les candidats à la candidature pour la présidentielle que le pouvoir projette d'organiser le 12 décembre prochain, malgré la volonté populaire, ont déposé, hier, leur dossier auprès de l'Autorité nationale indépendante des élections (Anie). L'opération de dépôt des candidatures prenant fin hier à minuit, deux anciens Premiers ministres d'Abdelaziz Bouteflika, Ali Benflis, président du parti Talaie El-Houriat, et Abdelmadjid Tebboune, ont acté leur volonté de prendre part au scrutin présidentiel. Avant eux, deux anciens ministres sous Bouteflika, Azzeddine Mihoubi et Abdelkader Bengrina, avaient fait de même. La liste des prétendants aux joutes électorales s'élargit aussi au président du parti El-Moustakbel, Abdelaziz Belaïd, transfuge du FLN, ou encore à Ali Zeghdoud, président du microscopique Rassemblement algérien (RA). En tout, ils seraient à peine une quinzaine à solliciter le sésame de l'instance de l'ancien ministre de la Justice, Mohamed Charfi, alors qu'ils étaient 147 à avoir retiré le fameux imprimé auprès de l'Anie. Une collecte de signatures qui s'est avérée très difficile dans le contexte politique que vit le pays. Expert en économie, très sollicité par les plateaux des chaînes satellitaires du pouvoir, Fares Mesdour n'aurait pas pu surmonter l'écueil des signatures exigées pour la validation de sa candidature. En revanche, l'animateur-télé Slimane Bekhlili, ou encore les illustres inconnus Ahmed Benaâmane et Abderrazzak Habirat figurent, eux, parmi les candidats à la candidature ayant déposé leur dossier au niveau de l'Anie. Ont-ils réussi à satisfaire aux conditions fixées dans la loi électorale, assouplie, du reste, par l'Anie de Mohamed Charfi, avec une révision à la baisse du nombre de signatures (50 000) de citoyens et la suppression des parrainages des élus locaux et nationaux, ainsi que l'élargissement de la prérogative de légalisation des formulaires de souscription des signatures à un plus large éventail de fonctionnaires, outre les présidents d'APC, dont une bonne partie a décidé tout bonnement de boycotter cette élection du fait de son rejet par la grande majorité du peuple ? Un rejet exprimé par les millions de citoyens qui manifestent chaque vendredi contre le système. Le candidat à la candidature Ali Benflis, qui a animé un point de presse à l'issue du dépôt de son dossier au siège de l'Anie au Palais des Nations de Club-des-Pins, a estimé que "si elle se tient", l'élection présidentielle du 12 décembre sera "le chemin le plus court, le moins dangereux et le moins contraignant pour faire sortir le pays de la crise, dans les meilleurs délais et de manière définitive". Pour lui, la campagne électorale pour cette échéance serait aussi une aubaine de soumettre aux Algériens son "programme d'urgence qui définira les chantiers à caractère prioritaire pour sortir l'Algérie de la situation politique et socioéconomique catastrophique instaurée par un régime politique corrompu deux décennies durant". Le premier responsable de Talaie El-Houriat n'hésite pas à se réclamer, par ailleurs, du hirak, soutenant qu'il a marché une dizaine de fois et qu'il continue de recevoir une moyenne de 200 citoyens chaque jour dans son bureau. "Je fais chaque jour le hirak dans mon bureau", a-t-il rétorqué à un journaliste qui lui posait la question sur sa relation au mouvement du 22 février et comment il comptait faire campagne dans un contexte de rejet de l'élection par le peuple. Pour sa part, l'autre ancien Premier ministre, Abdelmadjid Tebboune, considère que "l'élection présidentielle constitue un nouveau départ et l'unique solution à même de consacrer la souveraineté du peuple prévue aux articles 7 et 8 dont le hirak a revendiqué l'application". Soupçonnés d'être des candidats adoubés par le système, Abdelmadjid Tebboune et Ali Benflis sont la cible de critiques d'internautes. Les autres candidats à la candidature le sont également, mais à des degrés moindres. Eu égard à la mobilisation populaire, les candidats dont les dossiers seront validés seront confrontés à une difficulté de taille : comment faire campagne dans cet environnement politique hostile ?